faculté de médecine de paris
Année 1895
THÈSE
LE DOCTORAT EN MÉDECINE
Présentée et soutenue le Jeudi 12 Décembre 1895, à 1 heure
Fortuné BAUDOIN
Ex-externe des hôpitaux de Marseille (Concours, 1873)
Médaille d’argent (épid. chol. 1884-1885)
CONTRIBUTION A L’ÉTUDE
DE LA
ET DE I,A
PROPHYLAXIE
PAR LE LAIT STÉRILISÉ
Président : M. PROUST, professeur.
Juges : ^ professeur.
■ l MM. ALBARRAN et WURTZ, agrégés.
PARIS
imprimerie de la faculté de médecine
HENRI JOUVE
ic, HUB R AGI NB, 16
1895
10 11 12 v13 14 15 16 17 18 1^
FACULTÉ DE MÉDECINE DE PARIS
Année 1895 X H È S E N» .
POUR
LE DOCTORAT EN MÉDECINE
Présentée et soutenue le Jeudi 12 Décembre 1895, à 1 heure
PAR
Fortuné BAUDOIN
Ex-externe des hôpitaux de Marseille (Concours, 1873)
Médaille d’argent (épid. chol. 1884-1885)
CONTRIBUTION A L’ÉTUDE
DE LA
PROPHYLAXIE
PAR LE LAIT STÉRILISÉ
Président: M. PROUST, professeur.
IM. PANAS, professeur.
■ ( MM. ALBARRAN et WURTZ, agrégés.
PARIS
IMPRIMERIE DE LA FACULTE DE MEDECINE
HENRI JOUVE
P^ACULTÉ DE MÉDECINE DE DAUI8
Anatomie.
Physiologie.
Physique médicale..
Chimie organique et chimie minéralo.
Histoire naturelle médicale.
Pathologie et thérapeutique générales.
Pathologie médicale.
Pathologie chirurgicale.
Anatomie pathologique.
Histologie.
Opérations et appareils..
Pharmacologie.
Thérapeutique et matière médicale.
Hygiène..
Médecine légale.
Histoire de la médecine et de la chirurgie..
Pathologie expérimentale et comparée.
Clinique médicale.
Maladies des enfants..
Clinique de pathologie mentale et des maladies
de l’encéphale.
Clinique des maladies cutanées et syphilitiques.
Clinique des maladies du système nerveux.
Clinique chirurgicale .
Clinique des maladies des voies urinaires..
Clinique ophthalmologique.
Clinique d’accouchement.
Professeurs honoraires :
BROUARDEL.
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WURTZ.
Par délibération, en date du 9 décembre 1798, l’Ecole a arrêté que
les opinions émises dans les dissertations qui lui seront présentées
doivent être considérées comme propres à leurs auteurs, et qu’elle
n’entend leur donner aucune approbation ni improbation.
A LA MÉMOIRE DE MON PÈRE
A MA FAMILLE
A MES AMIS
A MES MAITRES
A MON PRÉSIDENT DE THÈSE :
MONSIEUR LE PROFESSEURIPROUST
Membre de l’Académie de Médecine, Inspecteur général des Services-
sanitaires, Commandeur de la Légion d’honneur.
AVAIVT-PISOI»OS
Arrivé à la fin de cette deuxième période -de nos
études médicales, nous considérons, comme un devoir
inéluctable, de donner un témoignage public de notre
reconnaissance, à tous nos maîtres, dont les savantes
leçons, nous ont enseigné le peu que nous savons dans
l’art de guérir, et en particulier à M. le Professeur Nepveu,
qui fut toujours si bienveillant pour nous, à M. le Pro¬
fesseur Benet, dont les leçons de pratique gynécologique
nous Ont été si utiles.
Que M. le Professeur Courcliet, de l’Ecole supérieure
de pharmacie de Montpellier et M. le Professeur Granel,
de la Faculté de médecine, sachent combien nous avons
avons été touché, des nombreuses marques de bienveil¬
lance et de sympathie, que l’un et l’autre nous ont témoi¬
gnées.
Nous remercions aussi, notre ami, M. le docteur 1...
d’Astros, pour les renseignements ({u’il nous a fournis,
pour notre travail.
Que M. Juge, premier interne à l’hôpital de la Con¬
ception, reçoive notre souvenir, pour le concours qu’il
nous a prêté, dans nos récentes études médicales.
Adressons encore ù notre cher ami, le docteur Icard,
nos meillüurs remerciements, pour les nombreux docu¬
ments bibliographiques, mis par lui à notre disposition.
Nous citons d’ailleurs dans notre thèse, des extraits de
ses travaux sur l’hygiène de l’enfance, travaux primés [)ar
l’Académie de médecine et la Société médicale des hôpitaux
de Paris.
Enfin, nous terminons en adressant à M. le Profes¬
seur Proust, qui a bien voulu acce[)ter d’être notre prési¬
dent de thèse, l’assurance de notre plus vive gratitude.
Contributicn à l’Etude de la Contagion par le lait cru
et de sa Prophylaxie par le lait stérilisé.
IXTIÎODUCTIOX
Ayant observé dans notre pratique médicale, des faits
qui nous frappaient par leurs relations certaines de cause à
effet, et dans lesquels, le lait, semblait jouer, à litre de fac¬
teur étiologique, le principal rôle, nous avons tenu à re¬
chercher tous ceux qui se rattachaient à cet ordre d’idées.
Nous avons pu voir, en effet, dans le cours de nos études
médicales, combien ces observations et ces faits de notre
pratique journalière, dont l’explication scientifique, ne se
présentait pas toujours nettement à notre esprit, ont ensuite
pris en quelque sorte un corps tangible, par suite des der¬
niers progrès de la science.
Voici donc, quel sera le plan de notre étude : Nous
répondrons en premier lieu à cette (piestion, la contami-
nalion pur Ig lait est-elle possible ? Notre réponse sera
que cette question est une vérité scientifique, absolument
— 8 —
démontrée et dans notre premier chapitre, nous donnerons
de cette affirmation, les preuves bactériologique, expéri¬
mentale et clinique.
La preuve de cette contamination étant faite, nous
nous étendrons un peu plus longuement, sur ce qu’elle
nous paraît avoir de plus inquiétant ; et, dans un deuxième
chapitre, nous étudierons, comment le lait cru, peut servir
de véhicule au microbe spécial de quelques maladies, con¬
sidérées isolément. Telle sera la première partie de ce
travail.
Ensuite, dans la deuxième partie, nous basant sur les
dangers de contamination spéciale, exposés précédemment,
nous concluerons qu’il ne faut administrer dans l’alimenta¬
tion, aux nourrissons surtout, élevés artificiellement, que
du lait bouilli, stérilisé. Pour faire accepter cette conclu¬
sion, nous devrons réfuter l’objection de quelques auteurs,
(jui soutiennent, que par l’action de la chaleur, le lait perd
ses qualités de liquide vivant et devient moins propre à
l’alimentation. Cette réfutation fera l’objet du premier cha¬
pitre de cette deuxième partie. Nous terminerons enfin, par
l’exposé sommaire des principaux procédés de stérilisation,
et par ceux, qui, dans l’intérieur des familles sont le plus
aptes à produire ce résultat.
9 —
PREMIÈRE PARTIE
De la Contagion par le lait cru
Considérations générales
Le lait, breuvage nourricier et bienfaisant, a, de tout
temps, été considéré, comme l’aliment unique, spécial, de
l’enfant nouveau-né. Mais la mère, quelquefois, pour des
motifs particuliers, ne peut confier son enfant à une nour¬
rice mercenaire, et est obligée de l’élever elle-même, ou de
le faire élever, au moyen de l’alimentation artificielle. On
s’est, pendant longtemps, élevé contre ce mode d’allaite
ment particulier, soit, par suite de la différence de compo¬
sition du lait employé, comparé à celle du lait maternel,
soit à cause des maladies fréquences, qui accompagnaient
son emploi. Ses détracteurs parurent avoir entièrement
raison, jusqu’à ces dernières années. Nous avons nous-
môme connu ce temps, où tout nouveau-né, alimenté au
biberon ou au pot, était, surtout dans les grandes aglomé-
rations urbaines, considéré comme voué à une mort cer¬
taine, sinon toujours prochaine; à peine faisions-nous une
exception, en faveur de ceux que l’on élevait aux champs
Baudoin 2
— 10 —
et qui, par conséquent, se trouvaient dans des conditions
toutes particulières d’excellente hygiène, Nous ne faisions
en cela, que suivre les principes que nous avaient inculqués
nos maîtres. Mais nous savons actuellement, que l’alimen¬
tation artificielle des nouveaux-nés est moins meurtrière,
et peut même, à la suite des progrès récents de l’hygiène
infantile, grâce aussi à l’invention de procédés nouveaux
d’alimentation, donner de très bons résultats. Nous sa¬
vons aussi qu’à l’aide de ces procédés nouveaux, le lait,
dans l’alimentation générale, offre moins de dangers que
par le passé, qu’il peut même être rendu à peu près entiè¬
rement inoffehsif.
Il n’en est pas moins vrai pourtant que cette condam¬
nation qui pesa si longtemps et si lourdement, sur le mal¬
heureux enfant, élevé artificiellement, était juste, légitime
et d’accord avec les faits ; il n’en est pas moins vrai, que le
lait cru, entrant comme élément, dans l’alimentation ordi¬
naire, était la cause de nombreux méfaits.
Aussi, la doctrine de la contagion par le lait, trouva-t-
elle de nombreux adhérents et de chaleureux défenseurs.
Le lait, n’en avait pas moins été considéré de toute
antiquité, comme l’antidote merveilleux, de bon nombre
d’états morbides ; ce n’était certes point sons motif, puis¬
que de nos jours, les indications du lait, en thérapeutique,
tendent à s’accroître de plus en plus.
Le rnoyen-ôge ne partagea pas cet avis, et condamna
le lait dans l’alimentation générale, l’accusant d’è!re la
source d’empoisonnements nombreux, pouvant amener la
mort à brève échéance.
Entre ces deux opinions extrêmes, est la vérité. Ni les
— 11 —
anciens, ni le moyen-âge n’avaient tort. Il ne s’agit ici que
d’une question d’origine. La source du lait est-elle pure, le
lait devient aussitôt breuvage bienfaisant ; est-elle impure,
il devient nocif. C’est cette nocivité, cette virulence du lait
cru, qu’il nous faut démontrer, et dont la science actuelle,
nous donne la clef : C’est la question que nous nous posons
et que nous allons essayer de résoudre, dans le chapitre
suivant.
— 12 —
CHAPITRE I
De la contagion en général par le lait cru
Prouves de cette contagion
Nous venons de dire que lorsque la source du lait était
impure, ce dernier pouvait devenir nocif. Il Test quelquefois
à la sortie du sein de la mère, ou à la sortie du pis de la
femelle laitière ; mais quoique d’origine pure, il peut aussi
être accidentellement souillé, comme nous le verrons plus
loin. Cette nocivité est le résultat, comme nous l’enseigne
la bactériologie, des germes ou microbes qu’il peut contenir.
M, Miquel, a dénombré les microbes contenus dans
un centimètre cube de lait, et il déclare qu’à partir de
l’heure de l’arrivée du lait au laboratoire, le nombre des
bactéries, qui n’était à ce moment-là que 9,000, a progressé
et s’est successivement élevé dans l’espace de 25 heures
jusqu’à 5,600,000.
Dans une autre expérience il en trouva jusqu’à 63,500,000.
Le lait, est donc un excellent milieu de culture pour
les micro-organismes, qui peuvent s’y développer, on le
voit, avec une effrayante rapidité.
Bien que le lait, par sa composition chimique, par le
— 13 —
fait de l’oxygène qu’il contient, subisse au contact prolongé-
de l’air, des modifications incessantes, ce sont surtout les
microbes qu’il renferme, qui sont les éléments les plus
actifs de ces transformations continuelles.
Cependant, au moment de la traite, avant d’avoir subi
tout contact prolongé avec l’air, le lait peut ne contenir
aucune bactérie. Chamberland (thèse de la Faculté des
Sciences, 1S79), a pu conserver intégralement du lait, même
pendant plusieurs mois, en le maintenant à l’étuve, à une
température constante de 25°.
A. — MICROBES PATHOGÈNES ET LEUR ORIGINE
Le lait contient donc de nombreux micro-organismes,,
qui, selon la catégorie à laquelle ils appartiennent, peuvent
le rendre virulent et propagateur des contages, mais avant
de nous occuper plus spécialement de cette propagation,
demandons-nous comment les microbes arrivent au lait,
quelle est, en un mot, leur origine ?
1° Origine directe des microbes. — Les germes
infectieux, pathogènes, arrivent quelquefois au lait par le
fait même des maladies aigües ou chroniques, qui viennent
modifier la composition chimique du lait chez la femme,
comme chez la femelle laitière.
a. — Faits affirmant la possibilité du passage direct dans
le lait, des microbes du sang de l’organisme maternel.
Si l’organisme maternel est injecté par les bactéries
pathogènes, pour(iuoi le lait ne pourrait-il pas être ù son
14 —
tour imprégné de ces micro-organismes, ([ui saturent le
sang de la mère ? Il est avéré que le lait s’imprègne facile¬
ment des matières odorantes et des médicaments ingérés
par la mère. Les labiées, les crucifères, les alliacées, eu
sont des exemples, et combien d’autres plantes peuvent
être citées ? L’aspbodèle, qui donne au lait de vache une
saveur particulière et agréable, le trèfle des Alpes, qui le
rend plus sucré ; l’absinthe, les marrons d’Inde, les pous¬
ses de sureau, le laitron des Alpes, lui donnent au con¬
traire, un goût amer ; le lait devient âcre et purgatif avec le
tithymale ; la varaise lui transmet un goût de fumier.
Et les modifications physiques subies par le lait, lors¬
que la mère a ingéré certaines autres plantes, ne sont-elles
pas à ce point de vue aussi concluantes ? Selon, en effet,
que la femelle laitière ,a ingéré de la garance, du safran, du
sainfoin, le lait devient tantôt rouge, tantôt jaune, tantôt
bleu.
Notons encore le passage dans le lait maternel, des
médicaments absorbés ; tels sont l’huile de ricin, l’opium,
le sulfate de quinine, etc.
Ces exemples pourraient être multipliés, mais ils nous
paraissent suffire pour démontrer le passage possible dans
le lait de la mère, des microbes ou de leurs excréta.
Ce passage s’effectuerait de la même façon que pour
les principes médicamenteux ou végétaux absorbés préa¬
lablement par l’organisme maternel.
Une autre preuve pourrait encore venir à l’appui de ce
fait, c’est que dans les diverses infections, les secrétions
du malade peuvent communiquer l’infection primitive,
telle est par exemple la salive du chien enragé, qui com-
_ 15 —
mimique l’affection rabique. On avouera donc qu’il serait
étrange, que le lait ne se chargeât point des germes infec¬
tieux de l’organisme maternel, alors que tant de subtances
et de médicaments peuvent s’y retrouver.
5. — Faits expérimentaux et cliniques prouvant la
vérité du passage direct des microbes du
sang dans le lait.
M. Chambrelent, pour prouver la vérité de ce passage
direct des microbes dans le lait, expérimenta sur des lapi¬
nes en lactation, avec le virus du choléra des poules. A la
mort des lapines, leur lait recueilli et ensemencé, donne
des cultures virulentes, qui, en 24 heures tuaient les pou¬
les. Le sang des petits ensemencé à son tour, ne fournit plus
les cultures du germe infectieux trouvé chez la mère.
Pasteur, présenta à l’Académie des Sciences, des
expériences de Koubassof. Citons seulement celles qui ont
trait au microbe du rouget.
Koubassof, injecte une portion de culture du rouget, à
une cobaye, ayant des petits récernments nés. Le microbe
apparaît dans le lait dix jours après.
Dans une autre expérience, il constate six jours après,
la présence des bacilles, et leur nombre progresse jusqu’à
la mort de la mère, qui a lieu 28 jours après.
L’impaludisme semble aussi pouvoir être transmis
par le lait. Boudin, (1) et Aymard,(2) en citent des exemples.
(1) Bau(Jin, p. 190, Thèse, 1812.
(2) Aymard, Thèse, 1891.
— 16 —
Visokowitsch et Langar, trouvent des colonies de
staphylocoques dans le lait de vaches, prises de fiôvre
puerpérale.
Escherich, observe 13 femmes plus ou moins grave¬
ment infectées ; il trouve les staphylococci albus et aureus,
isolés ou parfois réunis. Il examine en même temps des
puerpérales sans accidents fébriles et les résultats sont
négatifs.
Si nous portons encore notre attention sur des faits
cliniques connus antérieurement, on reconnaîtra que, dans
les épidémies de fièvre puerpérale, les symptômes que
présentaient les nourrissons, n’étaient pas sans analogie
avec ceux que présentaient la mère.
Bouchut et Karlinski, citent chacun une observation
où le fait est démontré. Bouchut a vu une mère atteinte
d’une arthrite du genou et en état de puerpéralité, trans¬
mettant à son enfant une arthrite purulente.
Karlinski, en son observation, nous montre un enfant
mort de septicémie, le dixième jour après sa naissance, et
cela, après avoir pris le sein de sa mère, atteinte de fièvre
puerpérale.
Quinquand (thèse d’agrégation, 1872), cite aussi des
exemples de ce genre.
Les faits établissent donc le passage direct, de l’orga¬
nisme maternel au lait, des germes pathogènes. Nous
aurons encore, en traitant des contagions en particulier, de
nouveaux exemples à citer de cette virulence directe du
lait.
2’ Origine indirecte des microbes. —- Les germes
infectieux du lait peuvent encore provenir d’affections loca-
— 17 —
les (mammité tuberculeuse, intlammations suppurées du
pis).
Le microbe s’est, dans ce cas, développé sur place ; il
est ensuite entraîné par le lait, dans lequel il trouve un
excellent et nouveau milieu de culture.
Ainsi, Escherich, sur six femmes atteintes d’inflam¬
mation superficielle du mamelon et de la mamelle, trouva 5
fois dans le lait de l’organe malade, des colonies de staphy-
lococcus albus.
L’infection indirecte ou secondaire du lait, peut se pro¬
duire en dehors de toute affection locale de la mamelle.
Les vaches recueilleront, par exemple, en traînant le pis
sur le fumier, les germes pathogènes, qui pullulent dans
ce milieu de décomposition incessante. Ce mode de conta¬
mination pourrait certes être évité, si le personnel delà
vacherie, chargé de traire les animaux, avait le soin de bien
laver et nettoyer avant la traite, avec l’eau bouillie, le pis
des vaches, et après s’être lui-même au préalable, désin¬
fecté les mains. Mais peut-on demander aux trayeurs la
pratique de cette rigoureuse antisepsie ? Assurément non,
et l’on aura toujours à craindre que leurs mains ne vien¬
nent ajouter de nouveaux germes, à ceux qui préexistent
peut-être déjà dans le lait.
L’eau devient aussi un véhicule pour les contages, soit
que par fraude on l’ajoute au lait, soit qu’elle serve à
additionner celui des biberons.
De même, les récipients, qui reçoivent momentané¬
ment le lait de la traite et ceux qui servent à son transport,
peuvent encore le contaminer, et devenir une cause de
danger pour le consommateur. Ils sont loin, en effet,
Baudoin 3
— 18 -
d’avoir été lavés avec soin, et contiennent souvent des
traces de lait aigri et fermenté.
La contamination indirecte du lait, pourra aussi s’o¬
pérer dans la bouche, la muqueuse buccale étant à l’état
normal, un lieu d’élection pour certains microbes; ceux-ci,
se mêlant au lait, à son passage dans la bouche, s’intro¬
duisent, par ce moyen, dans le tube digestif.
Le biberon peut être aussi une source d’infection acci¬
dentelle.
Entretenu souvent avec une regrettable incurie, on
voit, dans le biberon à long tube surtout, les parois de l’ap¬
pareil, imprégnées d’une couche crémeuse qui s’aigrit, et
le biberon dégager une odeur fétide; le lait, en traversant
cette couche fermentée, se charge de germes qui viennent
infecter le nourrisson.
Les résultats déplorables, dûs à l’entretien défectueux
des biberons, ont été signalés par Fauvel, à l’Académie de
Médecine (1881). Signalons encore, en passant, les microbes
de l’air, qui peuvent aussi souiller le lait. On a vu, dans
les salles d’hôpital, le lait s’imprégner des germes infec¬
tieux des malades qui s’y trouvaient alités.
Ne pourrait-on pas aussi attribuer aux insectes (mou¬
ches, etc.), une part dans cette contamination accidentelle
du lait ? Ne pourraient-ils pas, ces insectes, alors qu’on les
voit se poser sur les bords d’une tasse, ou d’une jatte de
lait, apporter ainsi au liquide des germes pris sur des ma¬
tières putréfiées ou des déjections quelconques? Cela nous
paraît probable.
Ces causes de contamination indirecte et les exemples
de contagion directe, donnés précédemment sont suffi-
— 19 —
samment typiques ; les considérerait-on seulement comme
probables, qu'il faudrait user des moyens prophylactiques,
pour éviter même la simple possibilité du danger. Àh!
certes, si comme certains auteurs l’affirment, la muqueuse
de l’appareil digestif était une barrière suffisante pour
empêcher les microbes de pénétrer dans notre organisme ;
si, certains facteurs, suc gastrique, fermentations, entrant
■en action, à l’arrivée du lait dans cet appareil, étaient les
obstacles barrant le passage aux micro-organismes, nous
nous inquiéterions fort peu de ce danger. Mais, l’évidence
se dresse devant nos yeux, elle nous dit de nous tenir en
garde, elle nous laisse entendre qu’il peut exister des
brèches à cette barrière, par où le germe contagieux peut
passer, et nous devons nous tenir d’autant plus en garde,
que ce germe peut pénétrer en nous, en s’insinuant même
à travers un épithélium sain.
Nous verrons d’ailleurs, en traitant de la tuberculose,
que l’action'du suc gastrique est nulle sur le bacille spéci¬
fique; nous pourrons effectivement nous rendre compte de
ce passage, en constatant les lésions de l’intestin et des
-ganglions mésentériques.
Mais (juelles que soient les causes qui favorisent ou
empêchent le passage des germes à travers la muqueuse
intestinale, contentons-nous de constater que l’infection se
fait par le tube digestif, et souvenons-nous qu’au Congrès
International d’Hygiène (Londres, 1891), les Intoxications
alimentaires furent à l’ordre du jour, et que le lait cru y fut
longuement accusé d’être le facteur de contagions diverses.
— 20 -
B. MICROBES SAPROOÈNES OU SAPROPHYTES. — MICROBES
CHROMOGÈxNES.
Les microbes saprogènes ou saprophytes sont les
agents des fermentations que subit le lait. Il faut pour cela
qu’ils soient nombreux et que leur contact avec le lait soit
prolongé. Ce dernier dégage alors une odeur désagréable.
D’après Vinay, un des premiers résultats de leur pré¬
sence est la coagulation de la caséine ; cette fermentation se
produit sous l’influence de nombreuses espèces bacté¬
riennes, en tête desquelles nous trouvons : le bacille de
Vacide lactique, les micro-organismes de la suppuration,
le hacterium coli commune, le bacillus prodigiosus. Ces
ferments hydratent le sucre de lait, mettent en liberté de
l’acide lactique et de l’acide carbonique, qui donnent au
lait fermenté son goût aigre et acide. La caséine est coa¬
gulée dès que l’acide lactique se forme, en proportion de
0,20 p. 100 et la quantité d’acide nécessaire cà cette coagu¬
lation est en raison inverse de l’élévation de température
du milieu ambiant.
La caséine est encore coagulée alors que le lait main¬
tient sa réaction naturelle alcaline ; ce résultat serait dû û
un produit de secrétion microbienne, le labferment, dont
l’action semblable à celle de la présure, a, comme cette
dernière, pour effet de précipiter les matièi’es albuminoïdes
du lait. Les microbes qui occasionnent ce dernier genre de
fermentation sont très résistants à l’action des tempéra¬
tures élevées et nous citons parmi eux ; le bacillus subtilis.
le b. fluore.Hcenÿ, le b. liquefaciens, le vibrion de la caséine
de Koch, etc.
Tantôt encore, cette caséification est due aux?n'/c/'oiî>e.s
chromogènes ; sous rinfiuence de ces derniers, le lait de¬
vient rouge, jaune ou bleu. Le bacille du lait bleu est
surtout tenace et difficile à chasser des laiteries où il a élu
domicile. Parmi les facteurs de la coloration rouge du lait,
nous citons le bacterimn mycoïdes de Scholl et le bacte-
rium lactis erythrogène.
Les microbes .saprogènes peuvent se développer en
dehors de toute contamination proprement dite du lait.
Un lait qui ne contiendrait que 100,000 germes par cmc.,
ne doit pas être regardé comme nuisible dans l’alimen-
tation.
Ce serait cependant s’engager beaucoup si l'on disait
que les microbes saprogènes sont entièrement inoffensifs.
Leur action coagulante sur la caséine, rendant le lait indi¬
geste, en est un premier exemple.
Ils paraissent en second lieu, agir dans la diarrhée
verte infantile, et quelques-uns peuvent sécréter des pro¬
duits toxiques aux dépens des albuminoïdes du lait.
Nous espérons avoir suffisamment démontré que le-
lait cru est un excellent milieu de culture pour les microbes
en général. Si, comme véhicule des contagions,lelait,amoins
attiré l’attention en France qu’à l’étranger, cela tient sur¬
tout à ce qu’a l’étranger, en Amérique et en Angleterre par¬
ticulièrement, l’usage du lait cru est très-généralisé, hln
France, au contraire, les faits de contagion sont peut-être
moins nombreux, et par cela môme passent facilement ina-
perçus, ce qui tient aussi sans doute à l’usage du luit sté¬
rilisé, dont rusage tend à se répandre de plus en plus.
Néanmoins, nos savants maîtres se sont engagés dans
cette voie, et leur sens pratique d’observation, ajoute tous
les jours une pierre de plus, ù l’édifice de la vérité scien¬
tifique.
L’Académie de Médecine elle-même, reconnaît cette
vérité, en conseillant de proscrire le lait cru, surtout de
l’alimentation des enfants.
Béchamp, l’adversaire du lait bouilli, avoue môme que
cette pratique est quelquefois utile, concession faite comme
à regret, mais dont notre argumentation tient compte.
Assurément, les faits de non contagion ne manquent
pas, mais, ils ne suffisent pas pour faire rejeter la doc¬
trine de la contamination par le lait cru. Dans les faits cités
de non contagion, il n’est pas nécessaire de nier la viru¬
lence du lait : il faut, pour être dans le vrai, tenir compte
d3 la constitution héréditaire ou acquise du sujet ; le mi¬
crobe, agira évidemment plus vite et mieux, selon que le
terrain sera plus ou moins bien approprié à ses qualités
virulentes, selon que le sujet sera ou fort ou débile, en un
mot, l’éclosion bactérienne se fera de préférence sur un
terrain de minus resistentiæ.
L’on devra aussi, dans l’appréciation de ces faits, faire
entrer comme facteur comparatif, le degré de virulence du
lait, c’est-à-dire le nombre des microbes, ou si l’on veut, le
degré de concentration des produits septiques sécrétés par
eux; « ces faits de non contagion, dit M. le professeur
« Labat, si nombreux soient-ils, n’inlirment pas ceux où
« la contagion s’est montrée ; ils indiquent, qu’il est des
— 2:^ —
« conditions dans lesquelles la contagion ne s'est pas
« exercée ; rien de plus. »
Ce sont ces conditions que nous avons exposées briè¬
vement, et lors môme que le danger ne serait que signalé,
nous devons le prévenir , or, il est avéré, et la science,
nous en offrant le moyen, notre devoir, est de le suppri¬
mer. N’usons donc plus, dans l’alimentation, que du lait
bouilli, stérilisé.
— 24 —
CHAPITRE 11
De la contagion en particulier par le lait cru
I.a contagion par le lait cru, avons-nous dit précédem¬
ment, peut-être directe ou accidentelle et indirecte.
Dans une première division de ce chapitre, nous trai¬
terons de la transmission directe de quelques affections,
telles que ; tubei^culose, scarlatine, fièvre aphteuse, etc.
Dans une deuxième division viendront quelques mala¬
dies que le lait peut transmettre indirectement ou acciden¬
tellement : Fièvre typh., choléra, etc. Cette division, nous
paraît utile, pour l’exposition de notre sujet, malgré ce
qu’elle peut avoir d’artificiel au premier abord.
Il est évident, en effet, qu’une contagion habituelle¬
ment directe, peut aussi dans quelques cas, être indirecte
et réciproquement. Ainsi, par exemple, la pommelière ou
tuberculose bovine, est transmise directement à l’homme
par le lait de l’animal atteint de cette affection, mais le lait
d’une vache saine, peut aussi être accidentellement infecté
par des poussières, provenant de produits desséchés d’ex¬
pectorations tuberculeuses.
De même, la scarlatine, peut-être transmise directe¬
ment par le lait provenant d’un animal (vache), atteint d’une
affection identique, et réciproquemement, les squames de
cette maladie, peuvent contaminer secondairement un lait
sain d’origine.
25 —
Dans quelques autres affections, la transmission est
toujours indirecte : fièvre typhoïde, etc.
A. Contagion directe de quelques affections par le
LAIT CRU
a. Tuberculose. — Les vaches sont souvent atteintes
d’une maladie connue sous le nom de pommelière et dont
les lésions sont identiques à celles que l’on observe chez
l’homme atteint de phtisie.
Cette identité des tuberculoses humaine et bovine est
généralement admise, et ce qui le prouve, c’est qu’on a vu
des tuberculoses locales et viscérales être contractées par
des vétérinaires, à la suite d’autopsies de vaches pomme-
lières et réciproquement la tuberculose humaine être ino¬
culée à l’espèce bovine (Chauveau et Nocard).
La bactériologie a confirmé ces résultats, et nous som¬
mes heureux de constater que notre cher maître, M. le
professeur Nepveu, fut un des premiers parmi les savants
qui trouvèrent le bacille de Koch, dans une mamelle tuber¬
culeuse (congrès de Rouen, association française pour
l’avancement des sciences).
Hirsch reconnut aussi le bacille dans un cas semblable
et Crookshank au fond d’un vase de lait qui avait reposé un
certain temps.
Rang, professeur vétérinaire à Copenhague a, chez des
vaches, dans 27 cas de mammite tuberculeuse, reconnu le
bacille spécifique. Le lait de la vache pourrait, d’après lui,
contenir le bacille, lors même que la mamelle serait saine.
Baudoin 4
Exmst Harold professe l’opinion de Bang, et admet
qu’il n’est pas nécessaire qu’il y ait une lésion du pis pour
que le lait soit contaminé.
Band (Congrès de la tuberculose 1889), a également
noté la virulence du lait chez des vaches à mamelles saines.
Bollinger (Réunion des médecins et naturalistes alle¬
mands à Baden-Baden, septembre 1889), dit que le lait des
vaches tuberculeuses, à mamelles saines, injecté dans le
péritoine de jeunes porcs, produit la tuberculose miliaire
aigüe.
Le docteur Icard expérimenta aussi avec du lait pris
sur une vache maigre, toussant beaucoup et tenue pour
tuberculeuse par un vétérinaire. Il injecta 30 grammes de
ce lait dans le péritoine de 3 cobayes. Comme contre-épreu¬
ve, il injecta aussi la même quantité de lait bouilli, au bain-
marie, chez 3 autres cobayes. Les premiers furent nourris
avec du lait cru, les seconds avec du lait bouilli et de même
provenance. Il sacrifia les cobayes 25 jours après. Sur les 3
cobayes injectés et nourris avec du lait cru, deux furent
reconnus tuberculeux, avec prédominance de l’affection
dans l’abdomen. Les 3 cobayes témoins n’offrirent aucune
lésion.
MM. Ernest et Peters (de Boston) (1), ont aussi inoculé
88 cobayes avec du lait de 15 vaches suspectes ; 12 cobayes
sont devenus tuberculeux. Ils ont aussi fait 121 examens
microscopiques de lait provenant de 36 vaches ; le bacille
fut trouvé dans le lait de 12 vaches, soit dans un tiers, des
lésions tuberculeuses. En outre, ayant recherché le bacille
(1) Mois Médical, n® 9, 189.5.
27 —
spécifique dans 33 échantillons de lait, vendu à Boston dt de
provenances diverses, ils ne le trouvèrent qu’une fois et sur
25 lapins, inoculés avec ces échantillons, 3 moururent tu¬
berculeux.
La transmission de l'infection nous est déjà expliquée
par la présence du bacille tuberculeux, dans le lait de vaches
phtisiques.
Quelques auteurs prétendent néanmoins que le suc
gastrique tue le microbe de Koch, mais Chauveau (1868),
puis Weiser, Bollinger, Huschberger, Falk, etc., ont dé¬
montré, soit par des digestions in vitro, soit par l’intro¬
duction de produits infectés dans le tube intestinal, que les
sucs digestifs n’opposent pas une barrière infranchissable
au bacille spécifique.
La connaissance de ces faits amena nombre de méde¬
cins à admettre la contagion de la tuberculose par le lait, et
Bang entrevit un des premiers la possibilité de cette infec¬
tion. Après lui vint Gerlach de Copenhague (1869), qui fit
des expériences pour montrer que le lait des vaches pom-
melières peut transmettre la tuberculose. Les expériences
de Gerlach, répétées à Berlin en 1873, ne réussirent pas ;
mais le fait fut vite expliqué ; on reconnut que la vache qui
avait fourni le lait n’était point phtisique. Gerlach considère
la surface digestive, comme une voie de l’infection puisque
les glandes mésentériques sont atteintes et remplies de
foyers caséeux.
Klebs (Prague 1873), à la suite de nouvelles expé¬
riences, qu’il serait trop long de relater, établit les conclu¬
sions suivantes :
1° Le lait transmet la tuberculose aux animaux en
expérimentation.
2* L'infection a pour véhicule la partie liquide du lait
3° La cuisson ne détruit pas les propriétés virulentes
du lait.
Klebs s'étonne et à bon droit de cette dernière con¬
clusion, à laquelle il ne s’attendait pas ; aussi, attribue-t-il
son échec à une cuisson incomplète du lait.
Bollinger (Zurich), cite des expériences, qui ne lui sont
point personnelles, et dans lesquelles le lait cru a conta¬
miné des animaux, et où, les animaux témoins nourris au
lait bouilli, étaient indemnes.
MM. Ernest et Péters (de Boston), déjà cités, ont fait
des expériences d’alimentation sur des lapins, des cochons
et des veaux, et ils ont trouvé que 4 p. 100 des lapins,
50 p. 100 des cochons et 30 p. 100 des veaux avaient été
infectés.
M. Martin (1884), sur 9 inoculations péritonéales, faites
sur des cobayes, avec du lait, pris à Paris à diverses sour¬
ces, a obtenu, dans trois cas, des altérations tuberculeuses.
Le lait semble donc une fois sur trois, provenir de vaches
malades, résultat concordant bien avec celui obtenu par
MM. Ernest et Péters.
Hirschberger, a trouvé le lait infectieux, dans 55p. 100
des cas (11 fois sur 20 expériences), et les expériences de
Summer, ont aussi amené ce dernier, à conclure à la
transmission par le lait, de l’infection tuberculeuse.
Fleming dit que l’action nocive du lait tuberculeux,
se fait surtout sentir, chez les enfants élevés dans les
— 59 —
villes et il ajoute que la vente de ce lait, ne devrait pas être
tolérée.
Peuch a aussi démontré.la transmission de la tubercu¬
lose par le lait et Thiéry fit cesser une épizootie tubercu¬
leuse chez de jeunes veaux, en faisant abattre une vache
phtisique, dont le lait était mêlé à celui d'autres vaches
saines.
M. Nocard cite un cas curieux et rare de transmission
au chat de la tuberculose bovine.
En dehors des faits précédents d’expérimentation, la
clinique apporte aussi son contingent sérieux.
Landouzy et Napias (1) citent des crèches responsables
de certains cas de tuberculose. Le lait, donné aux enfants,
n’était pas stérilisé ; on le coupait ave'c de l’eau non bouillie
et non filtrée.
Bollinger (Congrès de Düsseldorf), rapporte des cas
où, des malades et des enfants, nourris avec du lait de
chèvre, moururent peu après. On reconnaît à l’autopsie
que la chèvre était tuberculeuse.
Demne (de Berne), parle d’enfants sans prédisposition
héréditaire, morts detuberculoseintestinale et mésentérique;
ils avaient été nourris avec du lait de vaches atteintes de
tuberculose mammaire, et dont le lait contenait le bacille
spécifique.
Lydtin (2) cite un cas de la pratique du docteur Stang,
où il s’agit d’un enfant de 5 ans, dont les parents sont
sains, et qui succombe, en quelques semaines, à une phti¬
sie miliaire du poumon ; il prenait pourtant du lait d’une
(1) Congrès d’hygiène, Paris 1889.
(2) Congrès international vétérinaire de Bruxelles, 1889.
vnche, bonne laitière en apparence, mois (jui. conduite
plus tord à l’abattoir, fut reconnue tuberculeuse.
Le professeur Brouardel, cite encore un couvent, où
cinq pensionnaires de 14 à 17 ans, sans antécédents spéci¬
fiques, moururent phtisiques en un an. La vache, qui
fournissait le lait, était atteinte du mammité tuberculeuse.
Et maintenant, si nous jetons un rapide coup d’œil
sur les expériences citées, nous remarquerons que les
sujets en expérimentation sont de jeunes animaux (lapins,
cobayes), dont le lait est l’aliment naturel ; l’expérimenta¬
tion ne pouvait que réussir, puisqu’elle présente cet avan¬
tage, de se rapprocher des conditions de l’alimentation
infantile ; l’expérience clinique, à son tour, nous a montré
la nocivité du lait suspect.
La contagion par le lait cru, est dans ce cas incontes-
tahle, lorsque l’origine de cet aliment est douteuse, lorsque
surtout, comme dans nos grandes villes, l’on peut si sou¬
vent observer les effets nuisibles d’un lait fréquemment
frelaté, vendu par des marchands peu consciencieux et peu
soucieux de la santé publique. Et cette virulence du lait
que nous venons, en des faits cliniques nombreux, de voir
admettre en Allemagne, par Gerlach, Klebs, Bollinger, et
tant d’autres qui, en France, est reconnue aussi par Vallin
Chauveau, Peuch, Toussaint, Nocard et Brouardel, nous
éclaire sur la transmission de la tuberculose par le lait et
surtout sur la fréquence delà tuberculose, chez les enfants
élevés artificiellement.
Il y a quelques années, Papavoine, Rilliez et Barthez,
d’Espine et Picot, etc., considéraient comme fort rare la
phtisie infantile.
— :u —
La découverte du bacille de Ivoch, a permis de recon¬
naître la maladie, là où elle ne se montrait que sous la forme
d’une affection généralisée et sans localisations particulières.
Ces cas de tuberculose paraissent assez nombreux chez les
enfants au-dessous de cinq ans, et c’est surtout dans les
campagnes que l’affection exerce ses ravages et où elle
enlève environ le quart des enfants. La mortalité, à Paris,
des enfants tuberculeux au-dessous de deux ans, est encore
considérable, car Landouzy et Quérat, ont trouvé sur des
enfants de cet âge, une proportion de 31,4 p. 100 de'phthi¬
siques. C’est donc avec raison que nous insistons sur les
rapports intimes de la tuberculose infantile, avec l’allaite¬
ment artificiel.
Voilà donc un péril, considéré par la plupart des
auteurs, comme le plus fréquent que le lait puisse nous
apporter.
Mais, si en dehors de toute fraude, l’origine du lait est
surtout douteuse dans les grandes villes, cela ne tient pas
seulement au plus grand nombre de vaches infectées, mais
aussi aux conditions hygiéniques défectueuses de beaucoup
de vacheries. Laissons de côté les laiteries modèles; elles
existent peut-être à Paris, mais dans notre ville de Mar¬
seille, dont nous ne voudrions pourtant pas trop médire,
nous avouons ne pas en connaître; il y eût bien, il y a
nombre d’années, une tentative faite en ce sens, tentative
aussitôt avortée que conçue, malgré le concours du corps
médical marseillais. Combien de fois, en effet, nous sommes-
nous plu à nous arrêter dans les laiteries rencontrées sur
notre chemin ? Mais quel triste spectacle 1 Partout, sur
quelques mètres carrés de terrain, nous voyions de 6 à 8
ou 10 vaches, plus ou moins étiques, placées sur deux rau^s
parallèles ; entre les deux rangées, à peine un esimce sulïi-
santpour livrer passage à une ou deux personnes , presque
toujours un local, petit, insulïisant, à plafond bas, ne rece¬
vant l’air et la lumière que par une étroite porte d’entrée.
Et si nous ajoutons, h ce confinement, h cette exignité de
l’espace, la stabulation prolongée, l’insuffisance de la ven¬
tilation, la contagion [lossible entre les animaux, il nous
sera facile de nous rendre compte comment la maladie peut
être engendrée et transmise à l’homme. Cette opinion, que
nous nous sommes formée par une simple inspection, reste
l’expression exacte d’un fait vrai, et l’on ne pourra en dou¬
ter, quand nous aurons dit- que Gerlach, inspectant les
vacheries de la banlieue de Hanovre, a trouvé parfois plus
de la moitié des vaches laitières atteintes de phthisie ; et
l’on en doutera moins encore, si nous ajoutons que dans
certaines régions de l’Allemagne, ce nombre atteint 60
pour 100 et qu’enfin dans certaines régions urbaines, il
s’élève encore à 16 ou 20 pour 100.
Si cette constatation ne paraissait pas suffisamment
effrayante, nous rappellerions l’opinion de MM. Bouley et
Nocard fl) d’après laquelle le plus grand nombre des
vaches laitières de Paris et des environs, seraient presque
fatalement vouées à la phthisie ; heureux encore les pays,
où la proportion des vaches malades, tombe à 10 ou 12pour
100, comme en Brie ou en Beauce (Ilurtel et d’Arboval) !
Que ne faut-il encore penser, lorsqu’il est reconnu que
des vaches, présentant toutes les apparences extérieure»
(1) Itapi ort sur le Congrès international d’hygiène do Paris, 1878.
— 33 —
d’une santé merveilleuse, ont cependant dans les poumons
des noyaux tuberculeux (1).
M. Nocard, en effet, en examinant les viscères d’un
veau magnifique, mort presque subitement et destiné aux
concours agricoles, a trouvé des ganglions farcis de tuber¬
cules ; il put constater, par la suite, que la mère, bête
superbe et primée à plusieurs concours, avait les poumons,
les ganglions et les pis, parsemés de noyaux tuberculeux (2)i
M. Morot constata également aux abattoirs de Troyes,
que sur 423 animaux tuberculeux, abattus en six ans, la
majeure partie n’était point suspectée à l’examen sommaire
fait sur place.
Le diagnostic de la tuberculose bovine, est, on le voit,
entouré d’obscurités et de difficultés ; le danger serait
même très grave, si l’on tenait compte de l’opinion dé
quelques vétérinaires, qui prétendent que les meilleures'
vaches laitières sont celles qui sont atteintes de cette
affection.
Mais cette difficulté du diagnostic a été vaincue ; la
tuberculine permet le diagnostic précoce de l’affection (3).
Aussi M. Nocard, à cause de la certitude qu’il accorde aux
résultats de l’inoculation de la tuberculine à l’espèce bovine,
demande-t-il l’abattage de toutes les bêtes reconnues
malades par l’application de ce procédé.
Le 17 octobre 1895, des expériences ont été faites à
Marseille par M. Fouque, vétérinaire ; ce dernier inocula
la tuberculine à 7 vaches, 1 bœuf et 1 taureau. Une seule
(1) Académie de Médecine, 1“'’ septembre 1891. M. Leblanc.
(2) Académie de Médecine, 21 février 1891
(3) Académie de Médecine, 24 novembre 1891.
Baudoin 5
vache a donné la réaction diagnostique. Le 20 octobre^
cette dernière fut abattue, et des lésions tuberculeuses
furent constatées, entr’autres un tubercule de la grosseur
d’une noix dans le poumon droit. Une autre vache n’ayant
après l’inoculation donné qu’une réaction de O^O, abattue
en même temps, n’a pas offert de lésions spécifiques.
Une dizaine de jours auparavant, le conseil municipal
de la même ville avait voté l’impression d’un rapport très
intéressant de M. Boyer, rapport rappelant les impressions
rapportées du dernier congrès international vétérinaire de
Berne, auquel M. Boyer avait assisté. Entr’autres conclu¬
sions, celui-ci demande que l’on inocule deux fois par an
les vaches laitières. Des mesures analogues et obligatoires
seront-elles un jour adoptées ? Espérons-le, mais il y a loin
de la coupe aux lèvres, et si, pour notre malheur, nous
devons continuer à boire un breuvage qui, au lieu de la
santé et de la vie, peut au contraire nous apporter dans
certaines circonstances, la maladie et la mort, si nous
devons nous méfier du lait cru et le redouter, alors que,
dans ses plus belles apparences, il semble nous apporter
tous les dons de la santé, timeo... et dona ferentes, n’usons
pour plus de sécurité que du lait stérilisé, et nous n’aurons
plus à craindre les attaques de ce Protée aux formes mul¬
tiples qui a nom : tuberculose. Ainsi conclut le mémoire de
Peuch et Toussaint, conclusion adoptée au congrès inter¬
nationale de la Haye, après les rapports de Vallin.
L’ébullition fut reconnue nécessaire au congrès d’Hy-
giène de Düsseldorf (Juin-Juillet 1876).
L’Académie de médecine (janv. 1890), à son tour.
— 35
considérant que le lait peut être le véhicule du germe tuber¬
culeux, conclut à l’ébullition de tout lait suspect.
Nocard va même plus loin ; il faut, dit-il, faire bouillir
le lait, quelle que soit la bonne santé apparente de la vache
laitière. (Acad, de méd. 24 fév. 1891).
Et le Congrès international d’hygiène et de démogra¬
phie (Paris 1889) n’avait-il pas déjà dit dans ses : Instruc¬
tions au public pour qu’il sache et puisse se défendre de
la tuberculose, qu’il faut toujours, en cas d’allaitement au
sein impossible et quel que soit le mode d’allaitement arti¬
ficiel employé, donner toujours au nourrisson du lait
bouilli.
Les faits et considérants que nous avons énoncés nous
semblent concluants ; ils sont basés sur des recherches
scientifiques sérieuses, et les éminents observateurs que
nous avons cités ont fait tour à tour appèl à la bactériolo¬
gie et à la clinique pour résoudre un problème dont les
données autrefois obscures, ont reçu depuis une solution
conforme à la vérité.
Il nous faut donc prendre ces faits en sérieuse consi¬
dération, si nous voulons enfin tarir une des nombreuses
sources des maux qui affligent la créature, et rendre à la
vie des milliers d’êtres qui ne demandent qu’à vivre, et qui
pourront ainsi, un jour, augmenter les forces vives de
l’humanité en général et en particulier, de notre patrie
française.
b. Scarlatine. —L’origine bovine de la scarlatine est
surtout admise par les médecins et les vétérinaires anglais,
qui l’attribuent à un parasite de l’épiderme muqueux et
cutané. Ce micro-organisme se rencontre exceptionnelle-
— 3(3 —•
ment dans le sang, donnant ainsi lieu aux formes graves
de TalTection.
Nombreux sont les savants qui ont recherché et pen¬
sent avoir découvert le microbe scarlatineux. Nous citerons
parmi ces derniers ; Hallier, Hoffmann, Klebs, Litten,
Henoch, Friedlander, Klein, etc.
La nature microbienne de la maladie admise, il est
tout naturel que Ton se soit occupé de ses modes de pro¬
pagation, et en ce qui nous concerne, nous nous occupe¬
rons de sa propagation par le lait cru, fait qui a été établi
par Pow^er.
M. le professeur Laure (de la faculté de Lyon), à qui
nous empruntons cette affirmation, dit que Povcer attribue
cette contagion au lait de vaches atteintes dmne affection
non encore décrite, dont les symptômes peuvent échapper •
à l’attention, et n’apportent presque pas de'troubles à la
santé générale des animaux.
Klein, à son tour, est parvenu à isoler des liquides
virulents d’une vache malade, dont le lait était accusé
d’avoir donné la scarlatine, un microbe spécial. Ce microbe,
cultivé dans divers milieux, fut inoculé à des veaux qui
furent atteints de lésions cutanées et viscérales, semblables
à celles que l’on avait rencontrées à l’autopsie, chez la
vache malade. Un an plus tord, il trouva dans le sang des
scarlatineux, un micrococcus qui, cultivé de la même
façon, fut reconnu par lui identique au premier qu’il avait
découvert chez la vache.
D’autres inoculations faites avec le virus de ces deux
provenances, chez des rats, fit découvrir chez ces derniers,
après leur mort, qui eut lieu de 7 à 20 jours après l ino-
cnlotion, do la congestion pulmonaire, quelquefois de
l’hépatisalion, de la tuméfaction de la rate, du foie et des
lésions rénales. Le sang de ces animaux, également cultivé,
montra les mêmes microcoques que ceux observés chez
la vache malade et dans la scarlatine humaine.
Klein, voulant donner plus de valeur encore aux expé¬
riences précédentes, inocula le microbe de la scarlatine
humaine à deux veaux, et fit ingérer les mêmes microbes
par la voie digestive, à deux autres veaux. Il reproduisit
ainsi les lésions viscérales et cutanées qu’il avait obtenues
antérieurement, par l’inoculation, chez les veaux, des mi-
crocociues de la vache malade. Le sang des 4 veaux,
recueilli dans le cœur et cultivé sur gélatine, présenta des
microbes ayant les mêmes caractères que ceux qui étaient
d’origine bovine et qui avaient été cultivés de même façon.
L’identité de la scarlatine humaine et de la scarlatine
bovine fut attaquée par Crookshank. Celui-ci pense que le
lait, pour transmettre la scarlatine, doit être au préalable,
souillé par les éléments figurés de la scarlatine.
Quelle que soit l’origine de la contagion, directe ou
indirecte, le lait cru n’en reste pas moins le véhicule do la
transmission.
Aussi, allons-nous emprunter nos preuves aux par¬
tisans des deux doctrines.
Ruchanam, dans un rapport publié par le l’rsctilianes
(1878', décrit une épidémie de scaidatine qui se déclara à
South-Kensington, et dont la cause fut attribuée à l’inges¬
tion de crème.
A No^v-Barnet (nord de I.ondres), nouvelle épidémie
décrite dans le numéro du mois d’octobre, du même jour-
— 38 —
nal ; le docteur Saunders ratlribuo à l’iisafie du laii. 11 y
eut 140 cas, dont 130 éclatèreut du 20 avril nu 4 mai. La
dissémination des malades sur une gramU'. étendue, lui fit
penser au lait, comme cause de rexlension du mal, et
l’enquête qu’il fit le confirma dans son opinion.
Saunders fait un tableau détaillé des maisons et des
rues où régna la maladie, avec indication du marchand qni
approvisionnait chaque maison : il y avait 4 fournisseurs
de lait. Sur 140 cas, 131 usaient de lait pris chez le four¬
nisseur A, et 0 malades, de celui pris chez les trois autres
B, C, D. L’épidémie avait éclaté dans 58 maisons, snr
135 desservies par le laitier A ; et, sur les 286 maisons
desservies par B, C, D, 9 seulement offrirent des cas do
scarlatine. Ce qui parut surtout à Saunders, confirmer le
résultat de son enquête, c’est que, un membre d’une famille
qui buvait du lait du fournisseur suspect, tombe malade,
tandis que son frère, qui buvait du lait d’un des trois
autres, demeure indemne de la maladie ; dans une autre
famille, il constate en outre que trois personnes buvant du
lait de A, avaient eu la scarlatine ; les autres membres de
la famille, au contraire, ne consommant que du lait concen¬
tré en boîtes, ne furent pas atteints ; enfin, un autre malade,
qui ne sortait pas de sa maison, n’ayant presque plus de
relations avec le dehors, et se servant chez le laitier A, fut
très gravement atteint.
En 1880, dans un village, au sud de Manchester, se
développe une épidémie de scarlatine, dont la cause, d’après
Airy, est due au lait de vache ; les personnes atteintes
tiraient leur lait de la môme ferme ; celles qui étaient in¬
demnes s’étaient apjirovisionnées ailleurs. Sur les trois
personnes qni trayaient les vaches de celte ferme et qui
n’étaient pas atteintes de scarlatine, deux, A et B, habitaient
la ferme, la troisième, C, habitait ailleurs, chez son fds.
Au début de l’épidémie, l’un des enfants de ce dernier était
en pleine desquamation de la scarlatine. La traite du lait
s’effectuait sans ordre, les trois vachers trayant indifïé-
ramment telle ou telle vache, et le lait étant toujours versé
dans un môme récipient. Le vacher B et le neveu de A
portaient le lait deux fois par jour, à deux groupes de
clients habitant en deux points opposés de la ferme ; C por¬
tait le lait aux clients voisins de la demeure de son fils.
Or, ce ne furent pas seulement ces derniers, qui furent
atteints de scarlatine, mois le mal se déclara dans les trois
groupes de clients. S’il y avait eu une épidémie par contact
personnel, un seul groupe eût été atteint : mais le vacher C,
grand-père de l’enfant malade, habitait une maison où
l’encombrement était considérable, et l’on peut supposer
qu’il a apporté à la ferme des germes scarlatineux qui. de
ses mains ou de ses vêtements, sont tombés dans le lait.
En 1882, une épidémie qui éclate à Hendon, est attri¬
buée par Power, au lait d’une vache, qui était languissante,
avait perdu une partie de ses poils et venait de vêler. Thin,
ne considère pas cette épidémie, comme venant d’une in¬
fection primitive du lait. Dans une localité voisine de lien-
don, à Child’s Bill, il y avait eu, auparavant, trois cas de
scarlatine ; les 2 vachers qui trayaient le lait, circulant
chaque jour entre les deux localités auraient accidentelle¬
ment contaminé le lait.
Une autre épidémie, survient encore à Londres, en
1885. Les personnes atteintes avaient bu du lait d’une
— 40 —
ferme de Ilondon, les personnes indemnes, usnieiit du Init
d’nne mitre origine.
L'enquête, faite d’abord par Power, Cameron, Llylli.
et à laquelle Klein, s’adjoignit ensuite, démontra, chez un
grand nombre de vaches, des ulcérations aux pis, avec in¬
duration a leur base, ulcérations précédées de paimles,
qui devenaient bulbeuses, et s’ouvraient en produisant l’ul-
cération. Les lésions provenaient par contagion, d’une
vache, présentant une légère éruption sur les pis, et ache¬
tée par le fermier au début de l'épidémie. Le vendeur pos¬
sédait au moment de la vente de cette vache malade, d’an¬
tres vaches atteintes de la même éruption. Le fermier de
Hendon, avait acheté, à la même époque, deux autres
vaches saines, qui furent contaminées peu après, dans
l’écurie où on les avait placées avec la vache malade. Les
trois bêtes, mêlées plus tard avec les autres vaches de
l’étable principale, la contamination devint générale dans
le troupeau. Telle fut l’origine de l’épidémie. Mais il restait
à expliquer l’immunité d’un quartier, c(ui recevait le lait
de la ferme de Hendon ; l’enquête démontra encore, que le
lait provenait d’une écurie distincte, dont les vaches
n’avaient jamais été mêlées au troupeau principal, et dont
le lait était directement livré à la consommation dans ce
quartier privilégié ; et, qui plus est, sous les yeux même
des enfiuêtours, la maladie finit par se propager à cette
étable non encore infectée et de là au quartier de Londres
encore indemne de l’alïection. Ce ne fut (|ue par l’interdic¬
tion de la vente du lait, qu’on obtint la cessation de l’exten¬
sion de l’épidémie. A la suite de ces faits et des rapports
adressés au gouvernement, Klein fut chargé de soumettre
— 41 —
la question de la contagion, au contrôle d’expériences
scientifiques, h la suite desquelles il proclama, comme
nous l’avons dit, l’identité de la maladie des vaches de
llendon, avec la scarlatine humaine, et la possibilité de sa
j)ropagation par le lait cru.
C.-H. Cooper (12 Déc. 1888), fait un rapport à la so¬
ciété épidémiologique de Londres, sur une épidémie scar¬
latineuse, qui sévit dans les faubourgs de Winbledon et de
Merton. Cette épidémie, où 592 cas de scarlatine éclatèrent
(de fin Déc. 1886, à janvier 1887), fut attribuée au lait pro¬
venant d’une même source. Le vétérinaire inspecteur de la
laiterie avait déclaré que les vaches étaient saines, mais
Power, inspectant à son tour, trouva quelques vaches, qui
paraissaient relever de maladie, qu’il avait observée à Hen-
don. Le lait de ces dernières, mêlé à celui des vaches
saines, occasionna encore 21 cas de scarlatine.
Blanc (1888), dit qu’une commission médicale, contrô¬
lant à Cannes, les laitiers, trouva .chez l’un d’eux, des va¬
ches, ayant des ulcérations consécutives à des pustules.
On trouva plus tard, que des personnes, qui buvaient le
lait de ce laitier, avaient la scarlatine. Les malades isolés
et la vente du lait suspect interdite, l’épidémie commen¬
çante s’arrêta.
L’observation suivante a été adressée à l’académie des
sciences, par Picheney (de Besançon). L’enfant d’un de
ses amis, fut atteint de scarlatine grave ; il buvait ordinai¬
rement du lait bouilli, mais son père l’ayant conduit le
dimanche en promenade, il avait bu, dans une ferme, où
ils s’étalent arrêtés, et coup sur coup, plusieurs verres de
lait trait, et c’est le lendemain, que l’enfant était tombé
Baudoin 1 6
_ 42 —
malade. La vache qui avait fourni le luit, sortait d’après
Picheney, d’une maladie caractérisée par une hématurie,
mais sans ulcérations des mamelles. Il n’y a pas lieu de
croire à une coïncidence, car, la famille du fermier, était
composée de 4 enfants, dont deux buvant chaque jour 2 à 3
verres de lait cru, eurent une scarlatine légère, tandis que
ks 2 autres, n’en prenant pas, furent indemnes.
On s’est beaucoup, on le voit, occupé en Angleterre,
de la transmission de la scarlatine par le lait, et avec rai¬
son car, les statistiques anglaises, indiquent que cette ma¬
ladie aurait fait de 1860 à 1890, plus de 540,000 victimes.
Le lait, véhicule du germe contagieux, doit donc attirer
l’attention du médecin ; on a même demandé, en Angle¬
terre, l’interdiction de la vente du lait aux laitiers, qui ont,
dans leur famille, des scarlatineux. Mais les mesures de
rigueur peuvent être évitées ; il suffit pour prévenir le dan¬
ger, de chauffer le lait à 85°, pour détruire, d’après Klein,
tous les germes nocifs. Et nous pourrions ajouter à cela
que le lait, dont la provision est souvent faite pour toute la
journée, ne doit pas, même après avoir bouilli, séjourner
dans la chambre du malade, car il peut se réinfecter, quand
arrive la période de desquamation. C’est 15, un fait que
nous avons souvent observé, et qui nous parait devoir être
tenu en considération, surtout lorsqu’il y a plusieurs jeunes
enfants dans la famille atteinte.
C. Fièvre aphteuse. — La fièvre aphteuse, que l’on
observe chez l’adulte et chez l’enfant, est identique à la
cocotte ou fièvre aphteuse des animaux et se manifeste dans
ces deux origines, par des symptômes dont la concordance
est hors de doute et qu’il ne nous paraît pas utile de décrire
— 43 —
longuement. Disons seulement que chez riiomme, comme
chez l’animal, existent mômes phénomènes généraux,
mêmes localisations, mêmes complications, avec cette
réserve, que chez les jeunes sujets, la gravité du mal est
plus marquée, mais que chez les nimaux, l’intensité de
la maladie est habituellement portée à un plus haut degré
que dans l’espèce humaine. Mais qu’y a-t-il d’étonnant à
cela ? Le germe infectieux n’évolue-t-il pas dans le milieu
qui lui est spécialement approprié ? La maladie est surtout
caractérisée par un état fébrile généMl, suivie d’une érup¬
tion aphteuse, apparaissant sur lés muqueuses buccale et
nasale, sur la peau et particulièrement Sur les parties les
plus fines (mamelles, périnée, main, pied) ; ce sont ensuite
des ulcérations, succédant à la rupture des vésicules, un
état adymanique, des accidents gangréneux locaux.
Pour démontrer l’identité des deux affections, chez
Lhomme et chez l’animal, nous citerons les deux faits sui¬
vants ;
a) Deux enfants atteints de stomatite aphteuse, commu¬
niquent la maladie à' un chevreau, après avoir joué avec
lui et l’avoir embrassé. Le chevreau transmet la maladie à
sa mère. ■
b) La femme d’un cultivateur est atteinte de l’afiection
aphteuse ; la maladie se développe plus tard dans leur
étable. 11 fut démontré par l’enquête que les crachats de la
femme avaient souillé le fourrage, qui servit ensuite de
nourriture aux bestiaux.
Cette contagion de l’homme à l’animal est due à un
microbe que Nosotti découvrit en 1885.
Rivolto l’avait entrevu déjà dans ses recherches, mais
44 —
il n’avait pu, comme Nosolti découvrir ses propriétés pa¬
thogènes.
Klein, un on plus tard, confirme par de nouvelles
recherches l’existence et la spécifitéde ce micro-organisme.
Libbertz, toujours à la même époque, observa dons le
liquide des pustules développées sur la mamelle d’une
vache, un microcoque, pour lui spécifique de la fièvre
aphteuse, qui existerait dans le lait des vaches malades,
et pendant tout le cours de la maladie.
Le microbe ophtheux, d’après Klein aussi,trouve,dans
le lait, toutes les conditions nécessaires à sa pullulation et
n’en change en rien l’aspect extérieur.
Le lait peut donc propager la fièvre aphteuse et l’infec¬
tion a lieu directement, comme semblent le prouver les
expériences de Libbertz ou bien accidentellement. Il nous
suffira, pour l’instant de retenir ce fait important, c’est-à-
dire, la difficulté qu’il y a, parfois, à reconnaître la virulence
du lait aphteux et qui est dûe à son aspect normal, d’autant
plus, que son origine quelquefois douteuse, ne peut être
facilement mise en lumière par l’analyse ; le fait de la viru¬
lence n’en est pas moins évident, et l’on sait que les veaux
qui téteraient, pendant quelques jours, un lait ainsi conta¬
miné, sont presque fatalement condamnés à une mort
certaine, et cette nocuité se fait aussi sentir sur les jeunes
enfants.
Les faits de transmission par le lait cru, sont assez
nombreux et nous citerons les suivants, pris à des sources
autorisées :
Michel Sagar (1764), constata en Moravie, le premier
cas de transmission à l’homme de la fièvre aphteuse par
le lait. Le fait eut lieu, dans un couvenL dont les moines
furent atteints de fièvre et d’une éruption confluente d’aph¬
tes dans la bouche. Le couvent possédait des vaches, qui,
atteintes de la maladie, l’avaient transmise par le lait, qui
entrait pour une large part, dans l’alimentation du couvent.
Des faits analogues, furent observés, ou début de ce
siècle par Barbier et Bredin et d’autres sont cités en Alle¬
magne (173i), par Wendenburg, Tilgner et Lehnard et ce
fut aussi en cette année que îlertwig, Thann, Villain, ex¬
périmentèrent sur eux-mêmes les effets du lait provenant
d’nn animal aphteux, gravement malade, en en buvant
chacun une pinte pendant trois jours. Ce ne fut que le
deuxième jour, qu’Hertwig fut pris'de fièvre, de sensation
de chaleur à la bouche et de démangeaisons aux mains, et
au 6® que survint l’éruption d’aphtes sur la langue, sur les
mains, etc. ; une légère éruption sur la muqueuse buccale,
fut le seul phénomène que Thann et Villain observèrent sur
leur personne.
On a aussi remarqué qu’en temps d’épizootie, les per¬
sonnes usant du lait des bêtes malades, voient le mal sévir
sur elles.
Chauveau (1) rapporte le fait suivant : dans un pen¬
sionnat, les jeunes filles buvaient chaque matin, du lait
d’une laiterie voisine, dont les vaches, eurent une éruption
mammaire, prise un moment pour du cow-pox, mais l’érup¬
tion, d’ailleurs légère, d’aphtes, qui apparut sur les lèvres
des jeunes filles, indiqua la vraie nature inféctieuse du lait
hu par elles.
(1) Conférés International d’Hygiène et de démographie, Paris,
1889.
— 40 —
David cito de nombreuses observations, nous lui
empruntons les suivantes :
n. — Le docteur Bircher boit uue tasse de lait dons
une ferme ; oi)rès trois jours, apparition aphteuse sur la
langue. 11 apprend que le lait venait de chèvres ayant eu
récemment la maladie, et, il y avait dons la localité, de
nombreux cas analogues ou sien.
b. — Deux enfants buvaient du lait de chèvres, ayant
la fièvre aphteuse ; ils présentèrent trois semaines après,
d’assez graves symptômes ; fièvre, dysphagie, vomisse¬
ments puis aphtes à la bouche et au nez ; l’un des deux
enfants mourut.
M. Moulé (Revue analytique des journaux vétérinaires
allemands) cite quelques cas semblables.
M. le Professeur Proust, dans son travail sur la
tmnsviission de la fièvre aphteuse à l’homme, par l’m-
jeclion du lait d’animaux malades, nous dit qu’on a
constaté à Paris des cas de stomaüte aphteuse, chez des
personnes ne prenant pas d’autre aliment que du lait cru.
La fréquence do la transmission serait faible, si l’on s’en
rapportait aux observations publiées. Cette rareté tiendrait
d'après M. Proust, à ce qu’on ne recherche que rarement
l’origine dos cas d’aphtes chez l’homme.
Une commission anglaise se livra en 1869, à une
enquête, qui donna des résultats non moins probants ;
A Beecles, plus de 100 personnes furent atteintes,
d’éruptions vésiculeuses de la cavité buccale, avec troubles
digestifs divers et nerveux ; elles avaient bu du lait
aphteux.
A Bexhill, 13 personnes, tombent malades dans les
— .' 1.7 —
mômes conditions et présentent des ulcérations des lèvres,
des gencives, etc.
I/épidémie de Douvres, en 1884, atteignit 205 person¬
nes, buvant du lait d’une ferme où les vaches avaient la
fièvre aphteuse et dans celle d’Eaglay (1879), 115 habi¬
tants s’alitent ; quelques cas sont mortels.
Frœnkel en 1888, rapporte de nouvelles observations.
Ollivier 1890, nov. et déc.), eut l’occasion d’observer à
rhôpital, un plus grand nombre d’enfants atteint de stoma¬
tite aphteuse. Une enquête établit que les enfants venaient
des environs de Paris, et qu’à ce moment la fièvre aphteuse
sévissait sur les animaux, avec le lait desquels un certain
nombre d’eritr’eux avaient été alimentés.
M. Ollivier rapporte encore au Conseil d’Hygiène de
la Seine, un fait semblable qui lui avait été communiqué
par le Docteur Coubaux.
Terminons l’énumération de ces faits par les conclu¬
sions de la thèse de Debert : 1“ La fièvre aphteuse (vulgo
cocotte des animaux de l’espèce bovine), est transmissible
à l’homme.
2° Le lait des femelles atteintes de cocotte est ou peut
être dangereux, lorsque l’éruption se montre à la mamelle
et surtout à l’extrémité des trayons.
3° Cette contagion se fait par l’inoculation directe du
liquide aphteux sur une plaie accidentelle, ou par son
ingestion dans l’appareil digestif par l’intermédiaire du lait.
On pourrait opposer des faits contraires à ces exemples
de contagion, sans infirmer en rien la possibilité de cette
transmission. Il faut dans les faits de cette nature tenir
compte de certaines conditions, dont nous avons dit un
— 48 —
mot, en traitant de la contagion en général, et nous n’y
reviendrons pas.,
Si cette transmission de l’atTection aphteuse, niée ou
douteuse pour ([uelques uns est attribuée par ces derniers à
une irritation locale, mécanique ou chimique ou est consi¬
dérée seulement comme une éruption herpétique, faut-il
pour cela nier qu’à côté de ces accidents il existe un état
morbide, d'origine infectieuse, et qui rend nuisible le lait
ingéré ? Nous ne le pensons pas.
Les microcoques de Nosatti et de Klein, disparaissent
du lait à la température de l’ébullition. Conseillons donc
aux familles la stérilisation du lait, lorsqu’il existe au voi¬
sinage une épizootie de cette nature. Cette contagion spéciale
est peu fréquente, dira-t-on, cela est vrai assurément, si
l’on tient compte des observations relativement peu nom¬
breuses qui ont été publiées, mais nous répondrons avec
M. le Professeur Proust, que cette rareté relative dans les
cas d’aphtes chez l’homme, tient à ce qu’on ne procède
que rarement à une enquête sérieuse, qui pourrait en faire
connaître les origines, quoi qu’il en soit de cette réflexion,
l’ébullition du lait doit être néanmoins recommandée, puis¬
que si rare soit le danger, elle ne nous en protège pas
moins contre son éventualité.
tl. Pneumonie. — L’influence saisonnière amenant de
brusques changements de température et par suite les
refroidissements, ont été longtemps considérés comme les
causes principales de la pneumonie.
La constatation des microbes chez les pneumonifiues,
vint nous ne dirons pas supprimer, mais déplacer l’ancienne
— 49 —
étiologie, qui n’en demeure pas moins comme cause déter¬
minante de l’affection.
Bilroth, (1874) signale le premier des micro-organis¬
mes dans la pneumonie, et peu après Klebs la classe parmi
les maladies infectieuses.
Friedlander, Talamon, Fraenkel, Netter, etc., isolent
et cultivent les microbes donc l'inoculation détermine les
lésions pneumoniques.
Les microbes spécifiques (microcoque de Friedlander,
pneumocoque de Frœnkel-Talamon), peuvent exister dans
le lait, puisqu’on a cité des cas.de contagion pneumonique
de la mère à l'enfant, mais l’affection peut aussi être trans¬
mise par le lait, dans l’alimentation ordinaire ; il existe en
effet chez les bovidés une maladie spéciale, la péripneumo¬
nie qui présente plusieurs points de contact avec la pneu¬
monie humaine.
La péripneumonie de l’espèce bovine, est, disent les
vétérinaire : « U ne ma.la.die générale, caractérisée a.natomi-
« quement par une inflammation pulmonaire et pleurale.
« qui est l’expression locale, d’un agent spécial, d’un
« germe, dont l’organisme des bêtes malades est infecté. »
Cet agent spécial observé par Kübner, présente les
caractères du microcoque de Friedlander (1873), et ce der¬
nier, ayant cultivé les deux microbes séparément, crut
devoir, après les inoculations positives qu’il obtint avec ces
cultures, proclamer leur identité.
Bel et Nolen ont aussi découvert un microcoque sem¬
blable à celui de Friedlander, dans la péripneumonie du
bœuf, et cette maladie est généralement regardée comme
contagieuse. L’usage du lait provenant d’une vache atteinte
Jîaudoin 7
— 50 —
pourra par conséquent, transmettre la pneumonie à
Thomme, et Gastello (1) cite une épidémie de celte nature
qui eu lieu à Pendjah (Indes).
Un mémoire, lu à la séance du 23 mai 1885 (Société
de médecine et d’hygiène professionnelle) par MM. Lécuyer
et Dupré, rapporte deu.K observations, tendant h prouver la
transmission de la pneumonie de la vache à l’homme ;
comme, par leur longueur et les détails qu’elles renferment,
ces observations dépasseraient la limite du cadre de notre
travail, nous renvoyons, pour plus amples renseignements,
aux Annales d’hygiène publique et de médecine légale^
1885. tome XIV, p. 87.
Il ressort encore, selon nous, de ces faits, une con¬
clusion nécessaire ; la stérilisation du lait de vaches attein¬
tes de pneumonie.
E. Rage. — Il est des faits, tendant à prouver que le
lait des animaux atteints de rage, ne peut transmettre
l'affection rabique. A ces faits on pourrait opposer celui
que cite Balthazar Timœus : Plusieurs personnes et
entr’autres un paysan, sa femme et ses enfants, ayant bu
du lait d’une vache enragée, furent atteints aussi de la
rage. Le chef de la famille seul guérit ; les autres membres
de la famille ne purent êtres sauvés. Quelques mois après,
la servante, une voisine et quatre enfants, eurent, après
avoir bu du lait de la même vache, tous les symptômes de
la rage, et furent rapidement enlevés par le mal.
D’après Bouley, le fait de Balthazar, ne serait dû, qu’a
(1) Types de pneumonies que l’on rencontre dans le nord de
l’Inde et de l’Afganistan, Lancet 1881.
— 51 —
nn empoisonnement de la vache, par des plantes qu’elles
aurait broutées.
Cette transmissibilité de la rage par le lait n’est pas
bien prouvée. Disons cependant que Nocard, obtint un cas
de transmission par inoculation du lait recueilli chez une
chienne, et cela sur quatre tentatives, et que Chamberland
admet la possibilité de la contagion de la rage par le lait.
^ F. Charbon. — La virulence du lait, provenant d’ani¬
maux charbonneux, étudiée par Feser (1879), par Emler
(1880), et Garreau (1883), donna lieu à des conclusions et à
des résultats différents.
Chambrelent et Moussons démontrèrent cette virulence
du lait charbonneux (1884).
Nous citons ici, textuellement, les conclusions qui
leur furent inspirées par leurs expériences : « Comme
<( conclusion de ces expériences, il nous semble donc
« établi, que les bactéridies se trouvent dans le lait des
« animaux, mais que leur nombre y est infiniment moins
■ « considérable que dans le sang. On nous permettra d’insis-
« ter sur ce point déjà souvent mis en lumière, mais qui
« ressort nettement de nos expérience^, à savoir : que
« l’examen microscopique est un moyen tout-à-fait insuf-
« lisant, pour permettre de juger de la virulence ou de la
« non virulence d’un liquide. Si l’on veut rechercher
« celle-ci, c’est aux ensemencements dans un milieu de
« culture approprié, qn’il faut avoir recours »
Puisque le lait des animaux charbonneux, contient des
bactéridies spécifiques de l'affection, il nous parait assez
logique, de conclure encore à la stérilisation d’un lait
d’origine charbonneuse.
— 52 —
G. Typhus. — Ilusson, dans une note présentée h
l’Académie des Sciences, ne pense pas que le typhus conta¬
gieux des vaches, soit transmissible à l’homme par le lait.
Le lait des vaches ainsi atteintes, a néanmoins subi
des modifications dons ses éléments ; le microscope y
montre des globules agglutinés, muqueux, purulents ou
sanguins. Il y a diminution des éléments comburants et
augmentation très notable des éléments azotés.
Quoiqu’il en soit de ces modifications, le lait, dans ce
cas doit subir l’ébullition, avant de servira l’alimentation,
surtout à celle des nourrissons auxquels il serait nuisible.
H. Maladie innommée. — Klein, décrit sous ce nom
(Congrès international d’hygiène et de démographie, Lon¬
dres 1891), une affection, présentant des symptômes parti¬
culiers : inflammation de la gorge, entr’autres, sans qu’on
puisse préciser si l’on a affaire à une scarlatine ou une
diphtérie ; cette maladie se manifesta, sous forme épidé¬
mique, dans une école d’Edimbourg. Le lait, qui alimentait
les élèves, provenait d’une vache dont les pis étaient mala¬
des, et il suffit de supprimer le lait contaminé, pour faire
cesser l’épidémie.
IL Contagion indirecte de quelques affections par
LE LAIT CRU
a. Fièvre typhoïde. — Si la fièvre typlioïde est moins
meurtrière que la tuberculose, elle l’est plus encore que la
variole, et elle sévit aussi bien sur les enfants, que sur les
adultes.
Si l’air est un moyen do propagation, c’est surtout
avec les ingesta que se propage la maladie ; le lait sera
encore ici le véhicule de l’infection.
Soupçonnée depuis longtemps, l’infectiosité de la fièvre
typhoïde fut mise en évidence par Eberth, en 18S0, lequel
découvrît le bacille qui porte son nom, et dont le dévelop¬
pement se fait bien dans le lait.
Puisque le lait est ainsi un milieu de culture excellent
pour le microbe typhique, nous devons nous demander
comment et par quelles voies il arrive dans ce milieu de
choix et d'abord qu’elle est son origine.
Le bacille existe dans divers organes des typhiques ;
Bouchard l’a rencontré parfois dans les urines, mais il
prédomine surtout dans les matières fécales, et c’est l’eau,
qui souillée par les urines et les matières fécales lui sert de
véhicule. Le bacille arrivera donc au lait, par l’intermé¬
diaire de l’eau, soit qu’elle y ait été ajoutée dans un but
frauduleux, ou hygiénique (biberon), soit qu’elle ait servi
au nettoyage des vases et des récipients de la laiterie. Le-
rôle étiologique de l’eau dans la fièvre typhoïde est fort im¬
portant, et voici le tableau résumé de toute épidémie de ce
genre : une localité quelconque, village ou quartier, use de
l’eau provenant d’un puits, d’une rivière ayant reçu des
déjections de typhiques. On voit alors la maladie apparaître
et prendre peu à peu de l’extension, mais la cause recon¬
nue, il suffit pour enrayer le mal, de fournir de l’eau pui’e,
à la population ; à défaut d’eau pure, il suffit de faire bouillir
l’eau contaminée.
L’eau n’est pas la seule voie du microbe, i)our arriver
au lait ; tantôt ce sera la main du vacher, qui préalable-
— 54 —
ment souillée, conlaminera le luit (ju’elle est en train de
traire, tantôt, ce sera le pis de la vache, qui aura traîné sur
un fumier riche en microbes pathogènes, et qu’on aura né¬
gligé de nettoyer avant la traite.
Hart, en effet, a constaté de nombreuses épidémies
typhoïdes, dans lesquelles le lait souille et non bouilli était
la cause de l’infection. Dans 22 cas, il trouve le microbe
dans l’eau des puits, qui desservaient les fermes. Dans
40 autres épidémies il y eut des typhicpies, dans la famille
môme des laitiers.
Dougall rapporte l'observation suivante : six personnes
sont atteintes de fièvre typh. dans une laiterie. La maladie
se déclare, également, à une assez grande distance parmi
les i.iersonnes qui usaient du lait de cette provenance. 11 y
eut 80 malades atteints et 14 décès. Les causes de cette
épidémie furent les suivantes ; La chambre occupée par les
six malades, communiquait avec la laiterie. Les personnes,
chargées de les soigner, s’occupaient aussi du lait ; les pots
et les récipients étaient placés près des linges souillés par
les malades ; à côté de l’étable, se trouvait un amas de
fumier, où se déversaient les eaux sales de la cuisine, et le
cabinet d’aisance, recevant les déjections, débordait.
Klgar-Buk. raconte, qu’à l’infirmerie de Leicester.
12 cas de fièvre typhoïde, éclatèrent parmi les pension¬
naires, qui buvaient du lait cru. La majorité, qui buvait du
lait bouilli, demeura indemne. Le lait fourni à l’infirmeriè,
provenait d’une seule métairie, dont le fermier, avait suc¬
combé, à une hémorrhagie intestinale. Le puits de la ferme
était voisin d'une fosse d’aisance étanche et qui débordait.
On reconnut, que l’eau, (|ui servait à laver les vases, était
souillée par les infiltrations, provenant de la fosse d’ai¬
sance. L’épidémie cessa, par suite du changement de la
ferme où l’on s’approvisionnait.
Dans une épidémie, qui éclata à Dublin (Déc. IbTS et
Janv. 1879, on trouva la couse de l’infection, dans le lait,
provenant d’une ferme, où 3 personnes avaient été succes¬
sivement atteintes de fièvre typhoïde. Une enquête exacte
fut faite dons deux rues et un square, où la maladie fut
plus fréquente. On constata, que sur l'55 maisons, les ma¬
lades ne se trouvaient que dans 25 maisons recevant leur
lait de la ferme suspecte. Aucun cas ne fut observé dans les
autres maisons, qui recevaient leur lait de 25 fournisseurs
différents.
G.-J. Gœdeker vit une épidémie de même nature dons
l’établissement pénitentiaire de Horseo.
Murchisson nous dit que six de ses enfants, ayant bu
du lait d’une ferme où s’était déclaré la maladie, en furent
également atteints, et Taylor, Ballard, parlent aussi de ce
genre de contagion. •
De Pietra-Santa (1) signale aussi l’épidémie de Bristol
(1878), qui eut pour origine un lait souillé provenant d’une
même ferme. Les lieux d’aisance se trouvaient à 5 mètres
de distance de la source qui fournissait l’eau de boisson
aux vaches laitières. L’enquête attribua l’épidémie à des
matières typhiques qui avaient été jetées dans la fosse d’ai¬
sance ; il est probable aussi que l’eau de la source, souillée
par les infiltrations qui en provenaient, avait contaminé le
(I) Journal d’hygiôno, n" 85, 1881.
— 56
lait, soit quelle y Int ojoutce i)ar fnuide, soit (luc' les réci¬
pients. laves nvèc CGttC'cau, fussent mal égouttés.
Nous pourrions continuer à citer cio très-nombreux
cas de ce genre; contentonsmbus seulement de relater
encore l’épidémie de Genève (181)0', à la suite de laquelle,
le laitier qui vendait le lait cio scdonde main, assigna son
fournisseur devant le tribunal civil, (le fournisseur prin¬
cipal fut condamné à 1,500 fr. de dommages-intérêts envers
lé'laitier.
Erifih, È. J. Brown, rapporte à la II lino in àl ni a .soc/cfj/,
octobre 1891, un certain nombre de cas survenus dans la
ville de Decatur et dus au lait prévenant de fermes dans
lesquelles existaient des personnes atteintes dé ficWre
typhoïde.
Les exemples cités ci-dessus nous expliquent assez
bien le développement'de ces épidémies que l’on peut résu¬
mer ainsi : Un quartier d’une villé'dont les égouts et l’eau
de distribution sont les mômes c[ue dans les autres pàrtiés
de la ville, est envahi par la fièvre typhoïde. L’enqUété
démontre alors que les maisons atteintes reçoivent leur lait
du même fournisseur, c|uelquefois indemne lui-même de la
maladie, mais si l’on remonte à la source oii ce dernier
se pourvoit, on trouve un ôu plusieur.-i malades.
Et comment n’éii serait-il pas ainsi, si l’on songe aux'ineés-
santés violatiéns des règles dé l’hygiène dans les fermes
et dans les laiteries, tclTés que déjections' des malades
jetées sur les tas dé furriîer siégèanf'aux portes ou 'soùs Tés
fenêtres dé la laiterie, et coux èlsôürûés voisines recevant
ces malsaines infiltrations et portant souvent au loin lu
maladie. N’est-ce pas sulïïsant pour montrer l’imminence
du danger, que d’ignorants fermiers considèrent avec
insou.ciance ? Le docteur Dubousquet-Laborderie n’a-t-il
pos fait l’aveu (1) de la peine qu’il éprouva à faire compren¬
dre à une famille combien étaient dangereux ces jets de
matières typhiques ? et cette famille avait eu pourtant trois
personnes successivement atteintes ! et la cause ici en jeu
était toujours la même, c’est-à-dire l’eau d’un puits servant
à l’alimentation et ayant reçu des infiltrations.
Que ne peut-on penser aussi de la négligence obser¬
vée dans certaines crèches, où les lieux d’aisances se trans¬
formaient en laiterie, où le lait destiné aux enfants était
conservé en vases ouverts ! et cela parce que c’est le local
le plus frais de la maison (Napias).
La transmission de la fièvre typhoïde par le lait est un
fait évident ; assurément la contamination est ici, tout à
fait indirecte ; si l’eau y joue le rôle principal, le lait n’en
est pas moins l'intermédiaire visible, sinon effectif.
Il était de notre devoir d’indiquer ce grave péril de
contagion qui pourra toujours être évité, à la condition de
faire bouillir le lait et de ne pas agir comme en Normandie
-où, dans certaines parties de la campagne, on boit l’eau
conservée dans des mares sans ébullition ni filtration préa¬
lables.
h. Maladies de l'appareil digestif.
Les troubles gastro-intestinaux sont ceux qui reten¬
tissent le plus sur l’organisme infantile et les statistiques
(1) Congrès international d’hygiène. 1889.
prouvent l’effrayante mortalité occasionnée par eux. Le lait
cru rentre encore en cause, dans ces divers états morbides
que l’on rencontre surtout chez les enfants élevés artificiel¬
lement.
Nous avons en effet indiqué, en parlant de la contagion
en général, la pathogénie de ce genre d’intoxication.
1. Diarrhée estivale. — Henri Fauvel, dans sa note à
l’Académie de Médecine (1881), nous montre les biberons
mal nettoyés, tenus sons souci des règles de l’hygiène,
exhalant une odeur nauséabonde, comme cause de troubles
intestinaux divers. Le lait que ces biberons contiennent est.
souvent acide, à demi-coagulé et contient de nombreuses
bactéries, quelques vibrions. Les tubes des biberons qu’il
a examinés, incisés dans leur longueur, présentent du lait
coagulé et les mêmes microbes que ceux du lait du bibe¬
ron. L’intérieur de la tétine, terminant le tube, offre une
abondante végétation de cryptogames.
En Amérique, on insiste plus encore que chez nous
sur cette cause néfaste ; tous les troubles digestifs de l’en¬
fant sont décrits sous le nom de feeding hottles disease
(maladie du biberon) ou de summer disease (maladie d’été),
le lait fermentant davantage en été.
Adam Holt et Vaugham, d’Espine et Picot font, dans
la diarrhée estivale, jouer le rôle principal aux micro¬
organismes de la fermentation lactique.
2. Choléra infantile. — Les saprophytes seraient aussi,
d’après Baginsky, la cause du choléra infantile. D’après cet
auteur, l'ensemencement sur de la viande du bactériiim
lactis aerogènes, aurait donné une production ammoniacale
et une production de ptomaïnes.,
— 59 —
3. Enlérile. — Von Puteren a, suivant le régime ali¬
mentaire des nourrissons, expérimenté sur les germes que
leur estomac contenait et ce, afin de montrer les différences
qui existent au point de vue du nombre et de la nature des
germes. Il fit 120 cultures avec le liquide retiré de festomac
de 40 sujets de 3 à 27 jours. Les enfants alimentés avec le
lait de vache, avaient 20 % en plus de microbes dans leur
estomac, que ceux alimentés par leur mère. Quant à la na¬
ture des germes. Von Puteren dit que les micro-organismes
qui liquéfient la gélatine, prédominent dans l’allaitement
artificiel. C’est là, par suite de l’action possible de ces mi¬
crobes sur les albuminoïdes, une condition qui, sans être
précisément pathogène, est pour le moins fâcheuse. Il
semble, en effet, que l’acidité du liquide de l’estomac de¬
vrait être un obstacle à cette pullulation de germes nuisi¬
bles ; mais, d’après Miller, cette fermentation ne peut être
empêchée que si l’estomac contient une proportion de HCl,
égale à 1,6 p. 1000. Or, dans les expériences, la proportion
d’acide n’était que de 0,6 à 0,8 p. 1000, ce qui explique
cette pullulation ; d’autant plus qu'on sait que l’acide du
liquide stomacal est moindre dans les premiers mois de
la naissance.
L’entérite semblerait être le résultat du développement
de ces nombreux micro-organismes dans l’estomac, déve¬
loppement dû, d’une part, à la faible acidité du liquide sto¬
macal de l’enfant, comparé à celle de l’adulte, et d’autre
part, à ce que cette acidité peut encore diminuer par le fait
d'un catarrhe de l’organe digestif, résultant du peu de diges¬
tibilité du lait qu’il contient et qui s’y trouve en état de fer¬
mentation. Le suc gastrique, par suite de cette inflammation
— 60 —
de la muqueuse, est secrété en moindre quantité, et l’obs¬
tacle qu’il pourrait apporter aux parasites par ses propriétés
antiseptiques, est nul, ou du moins fortement diminué. La
conséquence de tout cela, c’est le passage des germes dons
l’intestin où ils acquièrent la liberté d’agir et de déterminer
la maladie.
4. Diarrhée verte. — La diarrhée verte, nous l’avons
dit ailleurs, serait due à l’introduction, par l’intermédiaire
du lait, d’un bacille spécifique dans l’intestin.
Mais l’explication des troubles digestifs n’en reste pas
moins vague, par suite de la difficulté de spécialiser les
microbes qui en sont la cause. Néanmoins, on a attribué un
grand rôle au coagulum. A l’état normal, le lait arrive li¬
quide à l’estomac, et par l’action du suc gastrique il est ré¬
duit en grumeaux très fins et ténus, et d’une parfaite diges¬
tibilité ; le lait fermenté, au contraire, y arrive à l’état de
coagula volumineux, qui sont moins facilement attaqués
par l’acidité du suc gastrique et plus difficilement digesti¬
bles. Ces coagula deviennent pour les ferments de parfaits
milieux de culture et c’est à la suite des recherches faites
sur ces milieux que les troubles digestifs divers ont été
attribués à la bactérie aerogenes, au baclerium coli com¬
mune (d’Escherich), à la bactérie acétique, liquéfiante,
blanche (de Baginsky), à la bactérie à pigment vert, liqué¬
fiant la gélatine.
Certains auteurs n’ont attribué les troubles digestifs
qu’à la continuation dans le tube digestif de la fermentation
commencée dans le lait des biberons.
Pour d’autres encore, la fermentation du lait donnerait
naissance à deux substances toxiques, le tyrotoxiron
— 61 —
(Vaugham), pouvant occasionner des troubles intestinaux
et la spasmotoxine (Brieger) pouvant être cause de troubles
nerveux.
5. Intoxications diverses. — Vaugham découvrit le
tyrotoxicon dans les circonstances suivantes : Une fabrique
de fromages, au nord de l’Ohio, dont les produits étaient
fort prisés par la clientèle, vit celle-ci s’éloigner, à la suite
d’empoisonnements résultant de l’ingestion de ses produits.
Vaugham, appelé à rechercher la cause de ces accidents,
en isola le tyrotoxicon.
Les symptômes produits par le tyrotoxicon, sont ana¬
logues à ceux qui caractérisent le choléra infantile, mais le
microbe sécréteur en est inconnu.
Le 7 août 1F86, survinrent des cas d’Empoisonnements
dans les hôtels de Long-Branch, caractérisés par des nau¬
sées, des crampes, des vomissements, du collaptus, et de
légère diarrhée. Une enquête, faite par Newton et Wallace,
attribua ces accidents au lait. Celui-ci, trait le matin, à la
laiterie, était versé, dans des récipients et transporté à 8 mil¬
les de distance, au moment le plus chaud de la journée. 11
subissait, par ce transport vicieux une fermentation, pro¬
duisant la ptomaïne de Vaugham. Le même laitier avait
fourni le lait, nulle fraude ne fut constatée-, les étables
étaient suffisamment propres. Les eiKjuêteurs isolèrent de
quelques échantilllons de ce lait, les cristaux de tyrotoxican,
présentant ses caractères et sa réaction habituelle : solubi¬
lité dans l’eau, l’éther, le chloroforme, l’alcool ; volatilisa¬
tion à la température de l’ébullition ; déposé en petit frag¬
ment sur la langue, y produisant une sensation de brûlure;
en plus gros fragment, des nausées et des vomissements ;
odeur forte et pénétrante. Us en firent aussi ingérer à un
chat une petite dose dans du lait ; ils provoquèrent de cette
façon, les accidents observés dons les hôtels de Long-
Branch.
Gamman (New-York , med. journal, 23 novembre/
1889), rapporte 23 cas d’empoisonnements, produits par le
tyrotoxicon.
Martin (Med. New, 16 septembre 1889) en signale
aussi quelques cas.
n. Maladie nauséeuse. — Signalons aussi une mala¬
die, qui selon so cause ou la prédominance de tel ou tel
symptôme a reçu divers noms ; Maladie lactée (mille
sickness), maladie nauséeuse tremblante (trembles), et sur
laquelle M.-J.-A. KimmeL(de Findlay, Ohio) a fait un inté¬
ressant rapport au Congrès International des Sciences
Médicales (Berlin, août 1890).
Celte maladie serait dùe à un agent infectieux, analo¬
gue au germe palustre ; elle se développerait dans les ter¬
rains en voie de transformation par la culture, et les lieux
les plus dangereux seraient ceux dont le défrichement est
le plus récent. C’est en mangeant de l’herbe, au lever du
jour ou le soir, que le bétail prendrait la maladie trem¬
blante ; et il serait atteint sur place. Les animaux devien¬
nent d’abord immobiles, ou bien ils errent sur un espace
restreint, en tremblant de tous les membres ; ils succom¬
bent souvent en quelques jours, sans que cette terminai¬
son soit fatale. Les femelles en lactation sont indemnes de
l’intoxication, dont l’élément est éliminé par le lait, qui
devient le véhicule de la maladie, pour les personnes qui
en font usage. Voici les principaux symptômes de celle
— 68 —
affection chez l’homme ; c’est d’aboi-J une sensation de
fatigue, de langueur, puis de l’anorexie, du pyrcsis, des
nausées, des vomissements ; il y a de la constipation, de la
soif vive, sans fièvre quelquefois même abaissement de la
température ; la peau sèche, la respiration haletante, la lan¬
gue humide d’abord, se couvre ensuite de fuliginosités ;
l’abdomen est rétracté, sons douleur à la pression, le
délire rare ; le malade tombe enfin dans la prostration et
meurt dans un coma profond. La maladie dure 15 à 20 jours,
dans les cas graves, 5 à 10 jours dans les cas légers, mais
alors avec convalescence longue et difficile.
D’autres empoisonnements analogues dûs ou lait, ont
été constatés encore par divers observateurs.
Dans la commune de Montrieux (arrondissement de
Romorantin). plusieurs personnes d’une même famille
éprouvèrent successivement des symptômes d’empoison¬
nement ; coliques aïgiies, diarrhée, vomissements, soif
ardente, etc., à la suite d’ingestion de lait. La personne la
plus malade, fut celle qui avait absorbé du lait en plus
grande quantité ; une seule personne indemne, n’avait pas
bu de lait ; Les malades se rétablirent en une quinzaine de
jours. Une des trois vaches, qui avaient fourni le lait, pré¬
sentait quelques jours avant la déclaration tles accidents
toxiques, un engorgement du pis ; elle paraissait souffrante
et il était difficile de la traire. La couleur, la saveur, l’odeur
de son lait, n’avaient rien présenté de particulier avant son
mélange, avec le lait des deux autres vaches. Les docteurs
Lhevalier. Cottereau, et Bayard, sur la réquisition du tribu¬
nal, recherchèrent les causes de cet empoisonnement ; ils
affirmèrent, dans leur rapport, l’infection du lait ; l’analyse
chitnique ne leur avait fuit reconnaître aucune substance
minérale toxique dans les matières vomies, et dans les
échantillons de lait, soumis à leur examen, ils n’avaient
trouvé aucun poison minéral ou végétal.
A la suite de ces recherches négatives, ils attribuèrent
les accidents produits, à l’altération du lait, dùe, soit à des
plantes ingérées par les vaches et nuisiles à l’homme, soit
à la maladie, dont une des vaches, était atteinte.
A Aurillac, 13 personnes furent atteintes de vomisse¬
ments fréquents et graves, après l’absorption de lait do
chèvre ; celle-ci mourut huit jours après, ayant offert tons
les symptômes d’une irritation intestinale. (Archives géné¬
rales de médecine, t. XV, p. 460.)
De môme, à Herefort (Wostphalie), ù la suite d’inges¬
tion de lait de chèvre, six membres de la môme famille
sont atteints de symptômes d’empoisonnement et plusieurs
d’entr’euxfurentendangerdemort(Kust/..mugaz.,t.XX\'ll,
p. 193),
Autre exemple. Une famille s’installe on villégiature
dans un petit village. La santé de ses membres est excel¬
lente pendant deux mois, puis, successivement, chacun
tombe malade, présentant certains signes d’intoxication.
Le docteur Üglesby, api)elé, fait une enquête, (jui ramène
à attribuer l’affection au lait de la vache qui alimentait la
famille. Il avait en effet constaté que le tuyau d’évacuation
des latrines aboutissait fi un petit ruisseau dont l’eau ser¬
vait de boisson habituelle à la vache ; celle-ci était infectée
par ce moyeu et transmettait avec son lait la maladie h la
famille.
11 resuite de tous ces faits (juo les produits septiques
— 65 —
du lait, soit qu’ils aient été élaborés directement par suite
de l'alimentation particulière de la vache, soit qu'ils aient
été mélangés accidentellement à ce liquide, n’en rendent
pas moins nocif l’emploi de celui-ci; nous en avons dit un
mot à propos de la fièvre typhoïde résultant souvent de
l’ingestion d’un lait de vaches traites sans aucun soin de
propreté.
Dans les affections suppurées du trayon (abcès mam¬
maires, cow-pox), on trouve habituellement le strepto-
coccus pyogenes, associé au staphylococcus aurons, et des
globules de pus, reconnaissables à leur contour frangé.
L’action d’un lait ainsi contaminé ne peut être que néfaste,
dans l’alimentation, surtout dans l’allaitement artificiel.
Troubles gastro-intestinaux divers, et symptômes plus
graves encore : érysipèle etc., sont le résultat de cette in¬
gestion, et même, suivant Crookshank, les épidémies de
scarlatine que nous avons citées, et attribuées par Klein à
un microbe spécial (le microbe de la scarlatine), ne devraient
être que le résultat du cow-pox et du streptocoque.
Si l’on n’a pu toujours, dans ces troubles variables de
l'appareil digestif, trouver l’agent spécifique des divers
symptômes morbides ou toxiques, que l’on observe, selon
les cas, il n’en est pas moins vrai que l’agent infectieux, le
microbe, cause de ces troubles, existe réellement. Il sera
donc nécessaire de faire bouillir le lait, même pendant assez
longtemps, à cause de la résistance de certains germes à
la chaleur, et surtout lorsqu’il s’agira de l’alimentation
infantile. Les diarrhées estivales surtout, le fait n’est pas
douteux, seront moins fréquentes dans ces conditions, que
si l’enfant est alimenté avec du lait non stérilisé.
üaudoin •
— 66 —
Nous terminerons cet article par l’adjonction de quel¬
ques observations personnelles :
Observation I
J. L., âgée de 5 mois, élevée artiflcielleraent au lait, chauffé
au bain-marie ; est fréquemment atteinte de désordres intesti¬
naux ; nous conseillons le lait bouilli, avec nettoyage antisepti¬
que du biberon et de la tétine. L’ébullition du lait est d’une durée
de 10 minutes et est faite pour un ou deux repas tout au plus
amélioration prompte.
Un mois après les mêmes symptômes reparaissant ; l’ébul¬
lition du lait est faite durant 20 minutes et les troubles intesti¬
naux disparaissent de nouveau. — Deux mois après l’enfant est
de nouveau fatiguée ; nous ordonnons alors une ébullition du
lait pendant une demi-heure. Les phénomènes morbides n’ont
plus reparu depuis.
Observation II
Marie-Louise R., d’abord élevée au sein par sa mèi’e, est
ensuite nourrie au biberon, par suite d’une grossesse confirmée
de cette dernière. Le lait est stérilisé avec l’appareil de Legay ;
les troubles gastro-intestinaux que présentait l’enfant, alors
qu’elle était nourrie par sa mère, disparaissent. — L’enfant a 4
ans actuellement et s’est depuis toujours bien portée.
Observation III
Césarine P., 35 ans, lingére, était depuis deux ans. atteinte
<le troubles digestifs divers ; nous ordonnons le lait bouilli et
aucune amélioration notable ne se produit chez la malade. —
Nous apprenons qu’elle n’avait ajouté aucune importance à notre
conseil ; elle buvait le lait cru que son laitierlui apportait matin
et soir ; elle le préférait par goût, au lait bouilli. Nous insistâmes
de nouveau et voyant l’importance que nous attachions à l’ébul¬
lition du lait, elle suivit des ce jour notre conseil ; les troubles
digestifs s’améliorèrent peu à peu et la malade fut guérie en
deux mois.
Nous avons pu suivre aussi, dans le service de notre
excellent ami, le D’Astras (Hôp. de la Conception),
chargé du soin des enfants assistés, les effets de l’allaite¬
ment au biberon. Disons d’abord que cet allaitement n’est
employé que pour les enfants syphilitiques ou suspects de
syphili.s et pour ceux auxquels, par suite d’encombrement,
une nourrice ne peut être donnée immédiatement.
Les enfants de la salle du biberon reçoivent exclusi¬
vement du lait de vache stérilisé, coupé de moitié ou d’un
quart d’eau, suivant l’âge de l’enfant, et additionné d’une
certaine quantité de sucre de lait. A partir de l’êge de trois
ans, le lait est donné pur. L’allaitement au biberon, avec le
lait de vache stérilisé, so fait à l’hôpital de la Conception
depuis trois ans. Avant cette époque, les enfants de moins
de trois mois étaient nourris au lait d’ànesse.
Un résultat indiscutable de l’allaitement au lait stérilisé,
est le suivant : « depuis l’introduction du lait stérilisé, nous
dit M. le D' D’Astras, les troubles gastro-intestinaux sont
extrêmement rares. Auparavant, avec le lait d’ânesse, et
surtout pendant l’été, ces troubles étaient pour ainsi dire
constants.
C. Diphtérie. — La diphtérie, a pour microbe spécifique
le bacille de Lœffer, qui se développe et pullule facilement
dans le lait.
Parmi les épidémies constatées, et dans lesquelles le
lait a été le véhicule de la contagion, nous citerons les
suivantes, rappportées par Hart, rédacteur du British med.
journal (1).
1° Trente familles buvant du lait d’une même métairie,
voient un grand nombre de leurs membres, atteints de
diphtérie, alors que 350 autres familles qut buvaient du
lait d’une autre origine, furent épargnés par l’épidémie.
Dans la métairie, quatre personnes avaient été atteintes en
même temps que les autres personnes de la localité.
Le lait fut avee raison soupçonné et l’on constata que
quatre personnes de la ferme avaient été atteintes de diphté¬
rie. Les latrines en même temps étaient mal entretenues, et
il existait des communications entr’elles et le puits de la
(1) Bnlletin de l’Aead. de méd, p. 911, 1882. — Congrès interna¬
tional des sciences médicales, Londres, 1881. — De l’influence du.
lait dans la propagation des maladies contagieuses.
— 69
laiterie ; elles communiquâient aussi, avec l’atmosphère de
la cour, où on lavait et conservait les récipients.
Dans une autre épidémie de même origine, on observa
que les linges de corps souillés, ainsi que lesexcréments d’un
malade, séjournaient dans l’appartement où étaient gardés
les pots à lait, et c’est ainsi que se propagea la diphtérie.
Power, dans une épidémie qui sévissait à York-Town,
reconnut encore l’in-fluence du lait. La ville conmptait 176-
maisons, 94 maisons usaient du lait de la même métairie et
dans 48 de ces dernières, on constata la diphtérie. Sur les
82 maisons qui n’usaient pas de ce lait, 9 seulement furent
atteintes, mais on sut que leurs habitants avaient entretenu
des rapports avec les malades, ou qu’ils avaient bu, au
dehors, du lait contaminé. Power ajoute que dans certaines
maisons, on laissait déposer le lait, afin d’en prendre la
crème, et l’absorption de ce lait ainsi déposé, fut l’origine
des cas les plus graves. Les familles qui avaient absorbé le
lait en plus grande quantité, furent plus atteintes que celles
qui en avaient moins ingéré, Power ne put constater direc¬
tement la virulence du lait; mais il pense qu’il devait être
contaminé avant sa distribution, qui se faisait par 4 ven¬
deurs, dont chacun avait son quartier, et tous les quartiers
de la ville avaient été atteints.
Le même auteur reconnut des affections éruptives de
la mamelle des vaches dans les épidémies de Barking, en
1888, et de Croydon en 1890; ce qui lui fit admettre dans
ces cas, l’infection directe du lait.
Klein inocula des cultures du bacille de Loëffler, sous
la peau de l’épaule,-et il obtint, chez les vaches ainsi ino¬
culées, des éruptions mammaires, et à un moment donné
de l’évolution de la maladie, il trouva dans le lait les bacilles
spécifiques.
Quoi qu’il en soit de l’origine de cette contagion directe
ou indirecte, nombre d’épidémies de diphtérie ont cette
origine, et il faut pour prévenir cette infection foire bouillir
le lûit.
d. Choléra. — Le bacille de Koch, agent de l’infection
cholérique, trouve encore dans le lait un milieu favorable.
Dans le lait ordinaire, abandonné à lui-même, on le voit
encore, en pleine activité au 6* jour ; il conserve même
pendant plusieurs jours sa vitalité dans un lait acide. Il
peut donc transmettre le choléra. Mais, comment le bacille
virgule arrive-t-il à contaminer le lait ? Ce sera par un mé¬
canisme identique à celui indiqué pour la fièvre typhoïde ;
c’est-à-dire par l’eau souillée des déjections de cholériques.
Nous rappellerons, à ce sujet, un fait personnel ; dans
l’épidémie de choléra, qui éclata à Marseille en 188-i, nous
vîmes à un moment donné, la maladie sévir avec plus d’in¬
tensité dans une rue de notre quartier ; nous soignions
alors la femme d’un laitier de celte rue frappée par l’épidé¬
mie. La chambre de la malade était située immédiatement
au-dessus de la laiterie, sur le plancher de la chambre, à
peu de distance du lit, une ouverture, qu’on pouvait fermer
et ouvrir à volonté, afin de voir ce qui se passe dans la lai¬
terie. Or, nous vîmes, à une de nos visites, pendant que la
femme vomissait abondamment sur le sol, les matières
arriver jusqu’à cette ouverture, à demi fermée, à ce mo¬
ment-là, et couler en partie sur la litière des vaches. Nous
avons pensé que ce fait devait déjà s’être présenté les jours
prédédents, et nous avons cru voir là, une connexion
__ 71 —
intime, avec l’augmentation du nombre des malades que
nous avions à visiter ; renseignements pris, les deux tiers
ne nos clients de cette rue se servaient à ce laitier. Ajoutons
que le système du tout à l’égout n’existait pas dans cette
rue ; le récipient général des excréments de toute la maison,
se trouvait è l’entrée du corridor, près d’une petite porte de
communication avec la laiterie ; et que nous eûmes encore
l’occasion plus tard de voir un cholérique, — au troisième
étage de cette maison —, et nous eûmes le loisir de voir,
en passant devant la niche ouverte où était placé le réci¬
pient en question, que le sol y était souvent souillé. D’où
nouvelle possibilité, pour les germes, d’infecter la laiterie
par la communication intérieure.
Nous n’insisterons pas davantage sur ce sujet, et nous
nous contenterons de citer le fait de Simpson ; Le navire
Ardenchilhn, présenta à Calcutta, dans son équipage, une
épidémie cholérique ; les hommes atteints, avaient bu du
lait souillé par son mélange avec de l’eau provenant d’un
tank voisin, dans lequel on avait jeté des déjections de
cholériques.
La conclusion à tirer, est que, dans toute épidémie ou
à la moindre menace d’épidémie cholérique, et surtout,
dans les contrées où l’affection est endémique ; il est abso-
**■ lument nécessaire de stériliser le lait, et à plus forte raison
encore, lorsqu’on veut le donner au malade.
O. Amygdalite. — Goocle a publié la relation d’une
épidémie d’amygdalite transmise par le lait (1) Cette épi-
(1) D'' P. Maurol. De l’infectiosité et de la contagiosité de l’amyg»
dalite aigué, thèse Paris, 1895.
demie atteint 40 personnes sur 358. Le lait venait d'une
ferme voisine. Les personnes seules qui buvaient du lait
bouilli furent épargnées. Cette épidémie est attribuée par
l'auteur à l’eau que les vaches auraient bue. Ces vaches
auraient été mises dans un pré voisin d’une ferme four¬
nissant du lait à une ville où les angines avaient précé¬
demment existé. Or, les vaches n’étant pas malades, Goocle
pense que les germes pathogènes avaient traversé leur
organisme pour s’éliminer par le lait.
— 73 —
DEUXIÈME PARTIE
Du lait stérilisé dans ralimenlaüon, au point de vue
de la prophylaxie des maladies conlagieuses,
transmissibles par Fnsajue du lait cru.
L’Etude spéciale que nous avons faite des maladies
contagieuses pouvant être transmises par l’usage du lait
cru, dans l’alimentation ordinaire et dans celle des nou-
veaux-nés, nous a montré toute l’imminence des dangers,
auxquels expose ce genre d’alimentation. Aussi au fur et à
mesure que ces dangers ont été mis en évidence, on a vu
s’opérer une réaction salutaire dans les esprits, et l’on
s’est demandé lequel, du lait cru, ou du lait bouilli, stérilisé,
devait l’emporter.
Le lait cru était encore, H y a quelques années, le
mode d’alimentation préféré ; nous avons ouï autrefois
nos maîtres le préconiser, et condamner le lait bouilli dans
l’alimentation ordinaire,, et surtout en faire défense for¬
melle, dans l’alimentation des jeunes enfants élevés artifi¬
ciellement. Le lait cru n’avait d’autre rival, dans l’alimen¬
tation infantile, que le lait vivant, le lait de la mère ; mais
actuellement, la balance semble pencher, nous dirons
même plus, penche complètement du côté du lait bouilli,
stéï’ilisé. La victoire de ce •dernier, est dûe à la connais¬
sance de plus en [)lu3 complète des micro-organismes, à
Raucloiri 10
— 74 —
la science bactériologique, dont les progrès incessants
sont venus, non pas bouleverser nos anciennes connais¬
sances, mais en modifier seulement l’orientation ; mais si
le lait stérilisé l’a emporté dans la lutte, c’est que, les nom¬
breux observateurs qui se sont occupés de cette question,
ont vu que les avantages du lait cru, considérés sous plu¬
sieurs points de vue, ne devaient plus entrer en ligne de
compte, dans l’alimentation, en songeant aux dangers qu’il
pouvait faire courir à l’homme, à titre de véhicule des
germes contagieux. Aussi, avons-nous, dans l’étude spé¬
cial de ces périls, tiré cette conclusion, que, dans tous les
cas, où l’usage du lait cru, pouvait nous faire redouter
une contagion, par virulence originelle du lait, il fallait dé¬
truire cette virulence par l’ébullition ; nous avons inême-
ajouté, qu’il fallait encore user de ce procédé, alors même
que cette virulence, était plus ou moins mise en doute par
les auteurs ; nous avons dit plus encore, que c’était un
devoir, qu’il ne fallait éluder, dans aucune circonstance,
car, en admettant un lait, d’origine pure, pris au pis de
l’animal, avec toutes les prescriptions d’une rigoureuse an¬
tisepsie, on n’a jamais la certitude absolue, que ce lait,
pour peu qu’il ait été manipulé ou absorbé tardivement, n’a
pas été contaminé secondairement.
Il est néanmoins des auteurs, qui se refusent à ad¬
mettre la nécessité de la stérilisation du lait ; nous aurons
donc, dans le chapitre suivant 6 réfuter leur opinion,
d’après laquelle, le lait perdrait, par l’action de la chaleur,
ses qualités de liquide vivant et deviendrait moins propre tV
l’alimentation.
CHAPITRE PREMIER
Du lait stérilisé et de ses avantages dans l’alimentation
Le lait cru, nous l’avons dit, était en grand honneur,
■il y a quelques années ; l’Académie de médecine, elle-mênre,
défendait de faire bouillir le lait ; on ne devait, d’après ses
prescriptions, ne le donner que chauffé ou tiède, au bain-
marie, Boudet, Broca, Chauffard, Delpech, Fauvel, Husson
et Pevilliers professaient cette doctrine et l’argument fourni
par tous les partisans du lait cru, était qu’il fallait se rap¬
procher du mode d’allaitement type, l’allaitement maternel,
qui ne donne pas un lait cuit, mais un lait vivant, n’ayant
subi aucune modification artificielle.
Le lait cru, d’après ses partisans, serait plus diges¬
tible que le lait bouilli, mais il faut reconnaître à ce dernier
un grand avantage, celui de se conserver plus longtemps
que le lait cru ; c’est là une condition essentielle, car sans
parler de la contamination possible du lait non bouilli, les
nourrices ne peuvent pas toujours renouveler la quantité
de lait nécessaire à l’alimentation de leurs nourrissons,
-dans le cas d’éloignement de la laiterie, et s'exposent sou¬
vent, par une abondante provision, à donner du lait ayant
fermenté.
Malgré cette première qualité du lait stérilisé, l’objec¬
tion n’en reste pas moins la même : et c’est toujours sa
moindre digestibilité qu’on reproche au lait bouilli,
C’est pourquoi J. P. Frank et Boêrrhave condamnent
l’ébullition. Fonssagrives n’admet aussi que rusagc du lait
pris directement aux mamelles de l’animal.
L’ébuilition d’après Brochard, Donné, Guyon, modi¬
fierait la composition chimique du lait, et désagrégerait ses
éléments.
Chalvet est de l’avis de Fonssagrives.
11 y a cinq ans, cette question fut de nouveau agitée
devant l’Académie de médecine, et M. Le Fort y soulint
que le lait bouilli était moins bon pour les enfants. D’après
lui, le lait cru serait rarement dangereux, tandis que, par
l’ébullition, on irait au devant d’un inconvénient certain.
L’ébullition pourrait néanmoins être faite, si l’on soup¬
çonnait la virulence du lait.
Dans la même séance, M. Devilliers attinbua à l’usage
du lait bouilli bon nombre de diarrhées infantiles. Les
dangers d’un tel lait seraient pour lui plus fréquents que
ceux qui résultent de sa virulence.
Le docteur Laurent, à la Société de Médecine Publique
(27 novembre f889), fait encore le procès du lait bouilli. 11
accuse l’ébullition de rendre les matériaux albuminoïdes
du lait moins assimilables, de modifier sa constitution in¬
time, en le privant de quelques uns de ses éléments natu¬
rels, tels que certaines graisses volatiles. Il en résulte,
d’après M. Laurent, une moindre digestibilité du lait bouilli
qu’il rend, comme M. Devilliers, responsable des diarrhées
infantiles.
Bécharnp, dans un travail intéressant (Acad, de rnéd.,
5 août 1890), conclut que l’ébullition empêche le lait de
vache de s’aigrir, sans nuire h sa coagulation, et que.
selon SQ durée et selon les cas, elle ne lue pns les micro-
zymas; elle ne fait que rnodilier leur fonction. L’ébullition
serait inefficace pour rendre inoffensif le lait d’une bêle
malade. On ne donnera donc, dans rnllaitement artificiel
que du lait provenant d’animaux sains.
Nous relevons néanmoins, dons les opinions mani¬
festées par les adversaires du lait stérilisé, des qualités
indéniables et qu’on ne i)eut refuser à ce dernier, c’est
qu’il est d’une conservation plus langue et qu'il s’aigrit
moins vite que le lait cru. Ce sont des véiâtés démontrées
par les expériences de Richet, qui a aussi trouvé dans le
lait une matière albumineuse et coagulable par la chaleur.
Quévenne a signalé aussi cette coagulation de l’albu¬
mine, à laquelle il attribue une moindre altérabilité que
lorsqu’elle est à l’état fluide dans le lait cru et récent, où
elle est alors facilement putrescible. La coagulation albumi¬
neuse résultant de l’ébullition , rendrait le lait moins diges¬
tible pour les estomacs délicats et les enfants.
Ces théories de l’ingeslibilitc plus grande du lait bouilli
résultant même d’expériences de laboratoire, peuvent avoir
quelques séductions, et les arguments avancés ne sont pas
toujours sans valeur ; mais à notre avis, rien ne vaut un
fait clinique bien constaté ; or, ils sont nombreux les faits
indiquant que l’estomac supporte bien le lait bouilli, ainsi
que les auteurs qui le préconisent dans l'alimentation.
Rouchut et Artemief sont de ce nombre.
M. le Professeur Tarnier lui-même, en parlant de
l’allaitement des enfants nés avant terme, dit que le lait de
vache bouilli, vaut mieux que le lait cru
Le Docteur Rouvier s’est aussi montré un des plus
cliuuds di'fenseurs du lait stérilisé (Congrès Internafonal
d’Hygiène, 1889), en se basant sur les dangers de contami¬
nation consrculifs à l’usage du lait cru ; et le Congrès se
prononça de môme, en faveur de rébullition.
A Bulle, le 10 octobre 1889, la réunion annuelle des
Médecins, déclare à l’ununimité, que le meilleur aliment de
l’enfant est le lait stérilisé. Le docteur E. Martin, dans un
travail nourri d’observations intéressantes, dit les heu¬
reux résultats de ce procédé. Le docteur Sandoz, tout on
concluant que le meilleur aliment des nouveaux-nés, est le
lait de vache, ajoute qu’en cas d’impossibilité d’alimentation
au sein, le lait doit toujours être stérilisé. Le docteur Week,
après s’étre élevé contre le sevrage prématuré, l’allaitement
mixte et l’administration précoce d’aliments autres que le
lait, se montre partisan convaincu du lait stérilisé.
Ce n’est pas assurément sans motifs, que ces médecins
ont adopté le lait stérilisé, et ce sera l’analyse chimique
qui nous donnera les raisons de cette adoption, en nous
montrant que les laits cru et stérilisé, n’offrent pas, dans
leur composition, une différence aussi marquée qu’on a
bien voulu le dire, (i’est ce que démontrent les chiffres
suivants, obtenus par Duclaux en faisant bouillir du lait
pendant une minute, le refroidissant ensuite, pour le sou¬
mettre aussitôt à la filtration sur porcelaine, et liltrant en
même temps du lait non bouilli.
Lait bouilli Lait non bouilli
Sucre de lait.
5,47.
... 5,43
Albumine.
.. U, 30.
... 0,31
Cendres.
.. Ü,.70.
... 0,49
Si l’on compare l’im ù l’autre les produits des liquides
— 79 —
de filtrotion des deux laits, on trouve que celui du loit cm
précipite à l’ébullition ; celui du lait bouilli donne aussi un
précipité un peu moins sensilde que le précédent.
Uutre l’albumine, les deux liquides de filtration con¬
tiennent de la caséine- qui est précipitée à chaud par les
acides et qui, dans les deux cas, peut se redissoudre dans
un excès d’acide. '
La proportion de lacto-proléine, serait aussi sensible¬
ment la même dans les deux laits.
L’inlluence de l’ébullition serait donc, d’après l’expé¬
rience de Duclaux, assez peu marquée, sur la proportion
et la qualité de la matière dissoute. Pour s’en rendre compte
il suffit de voir les différents aspects de la matière déposée
par nitration sur la paroi du tube de porcelaine; la couche
est deux fois plus épaisse avec le lait bouilli qu’avec l’autre,,
la quantité de lait étant égale dans les deux cas; elle est
aussi plus adhésive. Avec le lait non bouilli, cette couche
tombe au fond du vase, après s’être desséchée et y forme
un dépôt plus ou moins adhérent. L’agrégation do ces
particules flottantes est évidemment le résultat de l’ébulli¬
tion et est augmentée par elle ; c’est en quelque sorte un
commencement de coagulation. 11 est très compréhensible
en somme, que la coagulation commence déjà à la tempéra¬
ture de l’ébullition de l’eau, puisque le lait normal, chauffé,
à 130 ou 140’, se coagule facilement.
En consultant encore les analyses d’Yvon et de Girard,
on se convaincra que la proportion des matières albumi¬
noïdes, varient d’un lait à l’autre et qu’elle se trouve plus
faible dans le lait bouilli, ce qui rendrait celui-ci plus assi-
milahle, comme semblent le prouver les exi)érienccs faites
dans ce but.
Reiclimann en effet, a étudié chez un jeune homme de
20 ans, le mode d’action dans restomac des laits cru et
bouilli : la digestion du lait bouilli aurait exigé 2 heures 1/2,
et l’estomac se serait trouvé vide après 2 heures ; le lait
cru n’aurait été digéré c{u’après 3 heures et n’aurait cfuitté
l’estomac qu’a près 4 heures.
Le docteur Icard, dans quelques expériences in vitro,
faites pour mesurer le degré de digestibilité des deux laits,
a constaté que les flocons de caséine étaient beaucoup plus
ténus dans le verre renfermant le lait bouilli, que leur pep¬
tonisation était plus énergique, et que, par suite, la diges¬
tion y était plus active que dons le verre d’expérimentation
du lait cru. 11 s’était servi pour cette expérimentation, d’un
liquide très-riche en pepsine, obtenu par digestion, avec
une solution chlorhydrique de 500 oentim. c., pendant
20 heures à la température de SS”, d’une muqueuse de porc.
Un autre reproche adressé au lait bouilli, consiste dans
l’absence d’oxygène. Nous répondons à cette objection,
que le battage h la cuiller, le transvasement, peuvent rendre
au lait, l’oxygène perdu par l’ébullition. Celle-ci, serait
encore la cause de la pellicule, qui se forme à la surface du
lait, lequel, éprouverait, de ce chef, une perte de sub¬
stances protéiques, perte faible qui n’est que de 1 /25 à 1 /22,
et que l’on peut d’ailleurs éviter, en luisant bouillir le lait
dans un vase à col étroit ; nous ajouterons (jne le lait, per¬
dant aussi de l’eau, il y a une concentration du liquide, qui
compense la perte de protéine.
IJffelmann, admet que le lait bouilli, dans un rôciiiient
81 —
à large panse et à col étroit, n’offre, au point de vue chi¬
mique, aucune différence avec le lait cru.
Cette opinion est encore étayée sur d’autres faits expé¬
rimentaux.
Baudintz (de Prague), a fait prendre successivement,
à un jeune chien, et à plusieurs reprises, du lait cru, et du
lait soumis pendant une heure, dans un autoclave, à une
atmosphère et demie de pression, à l’action d’une tempéra¬
ture élevée. Il résulte de ces expériences que l’ébullition du
lait, et même une température de plus de 100“ n’amène
aucun changement dans la digestibilité du lait bouilli.
Notre ami, le docteur Icard, a de même expérimenté
sur des chiens et des chats, dont un lot avait été nourri,
moitié avec le lait stérilisé, selon la méthode de Soxhlet,
moitié avec du lait bouilli, dans la marmite américaine. Un
deuxième lot fut nourri avec le lait cru. Les résultats furent
satisfaisants dans les deux cas, avec une certaine supério¬
rité, en faveur du lait bouilli.
Uhlig, sous la direction du professeur Heubner (Poly¬
clinique de Leipsig, 1887), a expérimenté la méthode de
Soxhlet, sur des enfants malades, et offrant peu d’espoir
de survie. Il n’obtint qu’une mortalité de 20 p. 100. Les
autres enfants eurent généi’alement une augmentation de
poids ; 23 p. 100 seulement n’éprouvèrent aucune améliora¬
tion.
Les résultats de cette méthode, ne sont, pour Duclaux,
qu’une question de microbes, qui seraient détruits par la
stérilisation. Il ne resterait plus à redouter que les micro¬
bes de la bouche de l’enfant, mais, pour ce qui concerne
les troubles digestifs, on pourrait, en plus des micro-orga-
Baudoin 11
nismes, les attribuer à un mode d’action différent du lait
bouilli sur le tube digestif. La caséine se trouve, en effet,
dans un état physique différent et ne se coagule pas de
même façon ; or, au point de vue de la digestibilité des
laits cru et cuit, rien ne prouve, qu’il n’y ait entr’eux une
différence analogue et que la digestion ne soit plus ou
moins facile, selon que les grumeaux de caséine, sont plus
gros, ou plus ténus, plus ou moins cohérents. Alors, selon
le cas, ils résisteraient plus ou moins et séjourneraient plus
ou moins longtemps dans l’estomac, avant de passer dans
l’intestin. Ce qui prouverait cette manière de voir, c’est le
coupage du lait dans l’alimentation artificielle ; cette dilu¬
tion, diviserait la caséine, en grumeaux fins et ténus, et
produirait le même effet que le chauffage.
Budin, pense que ces modifications, que le chauffage
fait subir au lait, en rendent la digestion plus facile. Si l’on
ajoute, dit-il, de l’eau au lait cru, c’est pour qu’il ne ren¬
ferme pas plus de caséine que le lait de la mère, mais le
lait, contenant aussi du beurre, du sucre et des sels, qui
jouent un rôle dans l’alimentation, la dilution du lait, a
pour résultat de diminuer partiellement ces dernières
substances dans le mélange, ce qui le rend moins nutritif.
C’est pour ce motif que M. Budin, donne le lait pur et sté¬
rilisé au bain-marie à 100®, dans l’allaitement artificiel, et
dans plusieurs communications à l’Académie de Médecine,
et en particulier dans la séance du 17 juillet 1894, il a donné
de nombreuses et probantes expériences.
Tarnier aurait tiré des expériences faites par lui en
1885 des résultats inférieurs à ceux de Budin, mais M. le
— 83 —
Professeur Tarnier, nous l'avons dit déjà, est partisan de
l'ébullition,
M“® Henry, accoucheuse en chef de la Maternité, a
expérimenté le lait bouilli, soit à la marmite américaine,
soit à l’air libre, sur un grand nombre d'enfants. Les résul¬
tats qu'elle a obtenus sont assurément inférieurs à ceux
que donne l’allaitement maternel, mais ils sont très recom¬
mandables, en comparaison de ceux fournis par l’alimen¬
tation au lait cru.
M. Ollivier; il y a quelques années, disait à l’Académie
de Médecine, qu’il avait soigné nombre d’albuminuriques
qui buvaient et digéraient jusqu’à 3 ou 4 litres de lait
bouilli par jour ; c’est donc avec raison qu’il en concluait
que le lait bouilli n’était pas indigeste.
M, Debove obtenait aussi d’excellents résultats chez
les adultes avec le lait stérilisé. (Soc, méd. des hôpitaux,
10 octobre 1889).
Le lait bouilli, outre les avantages que nous lui avons
reconnus, en posséderait un autre, d’ordre secondaire si
l’on veut, mais dont on peut encore tenir compte; c’est
qu’il est plus économique. Le lait cru, en effet, tourne faci¬
lement ; il doit donc souvent être renouvelé.
Mais la plus belle qualité du lait bouilli, et qui doit lui
faire accorder la préférence, c’est qu’il détruit les germes
contagieux du lait cru.
La chaleur, en effet, agit sur ce dernier et le rend
inoffensif. On ne peut compter, pour produire cet effet, sur
les antiseptiques qui ne peuvent stériliser le lait et qui,
d’ailleurs, pourraient en altérer la composition, et qui sont,
pour la plupart, et à certaines doses, toxiques pour notre
— 84 —
organisme. C’est la chaleur seule qui peut produire cet
effet, en variant, suivant le germe qu’il faut détruire. La
chaleur, à certaines limites, n’est plus un agent favorisant
la vie, et la mort, chez les animaux, arrive rapidement,
lorsque la température du milieu intérieur atteint un degré
connu, et d’autant plus élevé que l’individu sur lequel elle
agit s’éloigne plus du type parfait. Ainsi, les éléments
mono-cellulaires, les microbes, sont bien moins sensibles à
la chaleur que les êtres organisés, et la température néces-'
saire pour leur destruction,- varie encore avec la période
d’évolution du micro-organisme; celui-ci, à l’état d’em¬
bryon, de spore, ne peut périr qu’à une température beau¬
coup plus élevée que ne le demande le microbe, en plein
développement.
Aussi Folger, s’illusionne-t-il, quand il conseille pour
empêcher sa contamination par les bactériens, de traire le
lait dans des vases qui seront aussitôt fermés hermétique¬
ment. Il espère ainsi rapprocher Tallaitement artificiel de
l’allaitement maternel ; mais cela empêchera-t-il le lait de
contenir les microbes qui infectent parfois l’organisme
entier, ou la mamelle de l’animal çt qui se mêlent au lait
sortant du pis ?
L’Académie de Médecine se prononçait il y a quelques
années contre le lait bouilli. En 1879, elle avait mis au
concours la question de l’allaitement artificiel. Les mémoi¬
res qui lui furent adressés concluaient qu’il fallait chauffer
le lait au bain-marie jusqu’à 28 ou 30 degrés, alors qu’il
n’était point pris au pis de l’animal. Ln seul mémoire con¬
cluait à l’adoption du lait bouilli.
En 1891, l’Académie donna comme sujet du Prix de
— 85 —
l’hygiène do l’enfamx, l’étude de la valeur et des effets
dans l’allaitement artificiel, soit du lait cru et tiédi au bain-
marie, soit du lait bouilli. Les conclusions des mémoires
envoyés à l’Académie furent en faveur du lait bouilli. Parmi
les partisans du lait cru, il en est un qui reconnait pourtant
qu’il renferme des germes infectieux pouvant se développer
plus tard dans l’organisme. Un autre fait une distinction
entre les cas ou l’on doit donner tantôt du lait cru, tantôt
du lait cuit. Deux mémoires dans ce concours furent pri¬
més. L’un des deux lauréats, M. Drouet de Paris, tout en
reconnaissant qu’en certains cas le lait cru est plus facile¬
ment digéré par certains enfants, reconnaît que dans l’im¬
mense majorité des cas l’ébullition ne diminue pas la diges¬
tibilité du lait.
Le second lauréat, le Docteur Icard (de Marseille), tout
en pensant que le lait bouilli est quelquefois difficile à digé¬
rer et qu’il peut même occasionner parfois de légers trou¬
bles digestifs, conclut encore à la nécessité de l’ébullition ;
sa conclusion est basée surtout sur le fait que la stérilisa¬
tion du lait préserve des maladies contagieuses.
Telles seront aussi nos conclusions ; dans la première
partie de notre travail nous les avons pour ainsi dire esquis¬
sées en ce qui concerne la nécessité de l’ébullition, et dans
ce chapitre nous avons montré que le lait bouilli n’était pas
impropre à l’alimentation et qu’il était très bien supporté
et digéré même par les nourrissons. Ici, nous devons nous
prononcer plus catégoriquement encore. On pourrait bien
dans quelques cas donner au nouveau-né le lait provenant
directement de l’animal. Mais il faudrait avoir la certitude
absolue que le lait est sain,' de bonne qualité, que la vache
— 86 —
laitière n'offre aucune tare ; il faudrait de plus que le lait
vint d’une laiterie modèle, où les lois de l’hygiène et d’une
rigoureuse antisepsie serait observées. Mais ne sont-ce pas
là trop de qualités demandées à la fois ?
Le lait, suivant notre avis, peut toujours dans les agglo¬
mérations urbaines être soupçonné de virulence ; aussi,
lors même que la digestibilité du lait bouilli serait quelque
peut inférieure à celle du lait cru, il nous faudrait conclure
à la nécessité de l’ébullition, nécessité inéluctable dans les
grandes villes surtout, où les nombreuses affections conta¬
gieuses qui s’y trouvent pour ainsi dire à demeure, peuvent
trouver et trouvent effectivement dans le lait un véhicule
propice.
L’ébulition est donc le seul et unique remède de la con¬
tagion possible. Stérilisons donc le lait, avant de l’ingérer
nous-mêmes ou de le donner comme aliment à nos nour¬
rissons. Si la prudence nous le conseille, notre sécurité
l’exige.
D’ailleurs, nous le répétons avec insistance, la plus ou
moins grande digestibilité du lait bouilli doit passer au se¬
cond rang dans nos préoccupations, en présence du grave
danger de contamination dont nous sommes menacés.Nous
donnerons encore ici, en ce qui concerne la digestibilité du
lait stérilisé, l’opinion du D'' d’Astros, déjà cité précédem¬
ment. Celui-ci considère comme absolument nécessaire le
coupage du lait, au-dessous de trois mois ; le lait pur,
donné aux enfants au-dessous de trois mois serait indigeste,
mais il peut être donné pur au-dessus de trois, et à plus
forte raison au-dessus de six mois ; l’allaitement au sein
est supérieur à l’allaitement artificiel au lait stérilisé. Cette
— 87 —
conclusion du D'' d’Astros ne s’applique, bien entendu,
qu’aux faits observés à l’hôpital, et ne vient nullement infir¬
mer les résultats que donne l’allaitement artificiel, dans la
clientèle civile, où les conditions sont tout autres que celles
du milieu hospitalier.
Les faits et observations que nous avons cités dans ce
chapitre et dans celui des troubles intestinaux, prouvent
que le lait bouilli et stérilisé, peut être absorbé sans provo¬
quer la moindre intolérance de l’estomac, ni engendrer
aucun trouble digestif ; aussi pour affirmer plus encore ce
fait, nous donnoris encore les observations personnelles
suivantes :
Observation I
Paul S., 15 mois, troubles gastro-intestinaux divers, était
cachectique. Prénait du lait cru, chautTé ou pris parfois à la
sortie du pis de la vache. Ce lait pris ainsi était mal toléré, sou¬
vent rendu caillé, nous ordonnons le lait bouilli ; amélioration
prompte des troubles de l’appareil digestif. Les vomissements
disparaissent. — Lait bouilli fort bien digéré.
Observation II
Félix P., lieutenant de vaisseau, arrive de Saïgon, avec
diarrhée de Cochinchine. Séjourne 2 semaines à l’hôpital prin-
— 88 —
cipal de Toulon, où il prend trois litres do lait par jour. Nous
voyons le malade dans sa famille, quelque temps après sa sortie
■de rhôpital. Nous lui faisons reprendre le lait bouilli et il arrive
'ù en tolérer jusqu’à six litres par jour. — Après avoir pris
durant un mois six litres de lait. - Il a une indigestion légère :
nous lui conseillons de diminuer la quantité de lait journelle¬
ment absorbée ; néanmoins le malade continua à partir de ce
moment à en tolérer encore parfaitement bien cinq litres par
jour, pendant deux mois. L’amélioration de son état étant sur¬
venue alors, il peut commencer à abandonner en partie lé
régime lacté.
Observation III
Eléonore R. présente tous les signes d’un ulcère de l’esto¬
mac, se résigne à suivre strictement le régime lacté absolu, avec
du lait bouilli. Arrive à prendre 4 litres de lait par jour. Amé¬
lioration lente et progressive et guérison au bout d’un an et
demi. Le lait avait toujours été fort bien toléré et digéré durant
cette longue période, et la quantité de lait en plus ou en moins
de la dose moyenne indiquée ci-dessus, avait peu varié.
— 89 —
CHAPITRE II
Stérilisation du lait. Procédés divers
Nous avons indiqué dans le chapitre précédent, com¬
ment la chaleur agissait sur les organismes mono-cellu-
iaires, sur les microbes ; nous l’avons montrée, comme
source de vie, lorsqu’elle ne dépassait pascertaineslimites,
et occasionnant, au contraire, la destruction des germes
virulents du lait, lorsqu’elle a un certain degré, s’éloignant
<le plus en plus, du type parfait, des organismes supé¬
rieurs. Ce degré de température variant selon l’âge et la
vitalité des microbes à détruire, nous devons, avant de
nous demander comment on stérilise le lait, et quels sont
les procédés plus ou moins compliqués de cette stérilisa¬
tion, et avant surtout, d’en décrire les plus usuels, indi¬
quer la température, à laquelle les micro-organismes, ne
peuvent plus vivre dansTeur millieu de choix.
G. Sternberg, Vinay, Duclaux, etc., donnent les tem¬
pératures suivantes comme fatales pour chaque microbe :
1“ Microcoques
Périssent en 10 minutes
Stapylococcus pyogenes aureus. 58®
— — citreus. 62®
— — albus. »
Streptocoque de l’érysipèle. 54°
Haiuloin
en 1 min. Iji
80®
12
— 90 —
2° Bacilles
Bacillus antracis (Chauveau). 51®
Bacille delà fièvre typhoïde. 56°
— de la pneumonie f Friedlander).. 56°
— de la diphtérie. 60°
— delà tuberculose (Galtier). 60“ résiste pend.
20 min.
— — — . 71° — 10 min.
( — du choléra asiatique.. 52°. .59° périt en
1 rn. 1/2
— — nostras. 50°. .55°
— prodigiosus. 58°
— fluorescens. 56°
— de Tacide lactique. 59° périt en 1 m.
— subtilis (Duclaux). 100° résiste
3° Spores
Périssent en 10 minutes
Bacillus antracis... 100°
— alvei. 100°
— butyrique. 100°
— tuberculose (Schill et Fischer). 100°
— — (Yersin). 70°
— de la fièvre typh. au-dessus de 60°
— de la diarrée verte. 100’
— subtilis.. 11.5° résiste quel¬
ques min.
— 91 —
4° V^irus
Vaccine. 52" à 54"
Hage... 60"
Charbon (Arloing). 70" en 2 h. 20 m.
— — . 80" en 2 heures
— — . 100" en 20 min.
On voit d’après ces chiffres, que l’élévation de tempé¬
rature pour détruire certains microbes, varie avec la durée
d’application de la chaleur. On obtiendra, en effet, au bout
d’une minute, le même résultat qu’au bout de 5 minutes,
en élevant de 4" à 5" la température primitive. Ainsi le
coma bacillus demande une température dé 59" pendant
1 minute, ou de 54" pendant 5 minutes. Ainsi encore la
moelle rabique perdra sa virulence au bout de 10 minutes
à 50" (Sternberg), au bout de 1 heure à 54" et au bout de
24 h. à 45" (A. Celli).
Une température inférieure, mais plus prolongée,
produira donc le même effet; qu’une température plus
élevée, mais d’une moindre durée d’application. Néan¬
moins, pour que la stérilisation soit aussi parfaite que
possible ; il conviendra d’élever la température du lait, à
un degré supérieur à celui auquel sont détruits habituel¬
lement les germes pathogènes qu’on vise.
Les moyens employés par les laitiers et les industriels
pour conserver le lait en quantités considérables, sont fort
nombreux ; ils sont également variables,' en ce sens que
les premiers, n’ont pour but (pje de conserver leur lait,
pendant ([uelques jours, en produisant une stérilisation
incomplète ; les seconds, au contraire, veulent obtenir une
— 92 —
plus longue conservation du lait, [celui-ci, étant souvent
destiné à subir de lointains transports, ce qui nécessite une
stérilisation absolue. Nous réserverons aux. procédés, qui
ent cet objectif, le nom de Méthodes industrielles. Celles-
ci, passées rapidement en revue, nous décrirons sous le
nom de Méthodes usuelles, des procédés plus simples,
pouvant être employés par les familles.
A. — Méthodes Industrielles de Stèrilisatio.n du Lait
§1. —Stérilisation incomplète
a. — Pasteurisation. — C’est un procédé indiqué par-
Pasteur, consistant dans réchauffement de boissons ali¬
mentaires, (vin, bière), jusqu’à un degré, notablement
inférieur à leur point d’ébullition. Cet échauffement suffit
pour détruire les germes des fermentations, ce qui permet
à ees boissons de supporter les transports au loin.
La pasteurisation appliquée au lait, en détruisant en
grande partie les germes qu’il renferme, permet de con¬
server ce liquide, au moins pendant quelques jours.
b. — La Méthode de Thiel. — Cette méthode est une
application du procédé Pasteur. L’appareil est formé d’un
cylindre à doubles parois. La cavité de cette double paroi,
est remplie d’eau, maintenue à. la température de 80 à
90° C., par un courant de vapeur. La paroi interne du
cylindre, ondulée, reçoit le lait. La circulation du lait sur
cette paroi est lente et d’une durée suffisante pour que sa
température s’élève à 70,75 dégrés[centigr.; l’échauffement
— U3 —
doit se maintenir entre ces limites, olin que le lait ne perde
pas sa saveur habituelle, ce qui, ordinairement, survient à
75". Le lait est ensuite amené, dans un autre cylidre, dont
la double paroi est remplie d’eau glacée, et où il se refroidit
brusquement jusqu’5 10, 12" C. On stérilise ainsi dans une
heure jusqu'à 150 litres de lait.
Ce procédé a l’avantage de retarder la coagulation, de
rendre le lait mois sensible, à l’action de la présure et de
ne point modifier sa saveur même paur un palais délicat
(Eleischman. Der Pasteurisir ungsopparat von Kart Thiel,
Milch Zeitung n° 12; 1884).
Citons encore les appareils Ingénieux du docteur
Fjord, de Copenhague, assez en usage encore, et celui de
Mabru, qui, bien que donnant de bons résultats, est tombé
en désuétude, par suite de sa complication.
Ces appareils en somme sont basés sur môme principe
qui consiste à échauffer le lait, dans de grands bains*
marie, à élever sa température, à un dégré plus ou moins
voisin de l’ébullition et à le refroidir ensuite, dans un autre
récipient.
On peut reprocher à ces procédés, sans parler de la
stérilisation incomplète qu’ils produisent, de livrer du lait
aux revendeurs en récipients d’une capacité considérable,
qu’il est nécessaire d’ouvrir pour faire le transvasement
dons d’autres vases, qui seront cédés à de nouveaux inter¬
médiaires; de transvasements en transvasements, le lait
arrivera de nouveau souillé jusqu’au consommateur.
— i>4 —
§ 2. Stérilisation rohiptàtc'
Cette méthode de stérilisation absolue, a pour but do
détruire tous les germes du lait, même les spores les [)lus
résistants, et (jui ne sont détruits qu’5 une température
supérieure à celle de l’ébullition ( I ).
Les procédés employés pour la stérilisation complète
du lait sont nombreux, et l’on a que peu de détails sur eux,
les industriels ne tenant guère à les divulguer. On sait une
chose, c’est qu’un semblable résultat ne peut s’obtenir ([u’en
maintenant le lait pendant plusieurs heures, à la tempéra¬
ture de 100 degrés, ou bien, qu’en le chaunant pendant
quelques minutes à une température de 110 à 112° O.
Le lait préparé par ces procédés est, par sa saveur,
inférieur au lait pasteurisé.
En dehors d j sa saveur de cuit, ([ue la stérilisation
complète donne au lait, et qu’on ne sait au juste à quoi
attribuer, on peut encore reprocher à cette méthode de
stérilisation absolue de faire perdre au lait son opalescence,
en lui donnant une teinte brune qui serait dûe, d’après
Duclaux, à une altération de la caséine en suspension dans
le liquide ; celui-ci peut encore se décomposer après un temps
plus ou moins long, et prendre une saveur amère. Mais
ces inconvénients sont compensés par do nombreux, avan¬
tages, d’abord par sa longue conservation, ensuite par la
sécurité (pi’il offre au consommateur, préservé ainsi des
diverses contagions dont le lait, à l’état de crudité, peut
Lœffer, Ueber Bactérien in Uer Milcli, Berlin, Ivlin. WocliPiiscli,
s'87, et 31.
être le véhicule, et parce qu’eiiün, plus que le lait [)asteurisô
il [)eut supporter de longs transports sans s’altérer.
Bien que les proéédés de stérilisation absolue du lait
peu connus généralement, nous mentionnerons celui de
MM. Hignette et Th. Timpe, si bien d/crit pur Gtiavane, au
livre duquel nous renvoyons, pour la description complexe
do l’appareil.
B. MKTiionKS usurmLES de stérilisation du lait
11 ne s’agit plus ici de stérilisation complète absolue,
mais de stérilisation rapide, pouvant suffire aux besoins
journaliers de l'alimentation infantile bu de l’alimentation
ordinaire des adultes.
La stérilisation, dans ce cas, sera d’autant plus par¬
faite que la température du lait sera portée à un degré plus
élevé. Les procédés de stérilisation usuelle sont assez-
nombreux, mais est-ce à dire pour cela que les familles les
adoptent facilement? Dans les classes populaire et moyenne
on n’use guère de ces appareils, soit à cause de leur prix
relativement élevé, soit parce que, si simples soient-ils, on
trouve encore leur manipulation trop complexe ; heureux
encore le médecin qui peut faire adopter un procédé de
stérilisation même réduit à sa plus simple expression ! En
attendant de dire toute notre pensée sur ce point, nous
allons passer en revue les principaux appareils de stérilisa¬
tion usuelle.
§ a. Marmite américaine. — C’est un vase en étain, pou¬
vant contenir un litre de lait environ et que ferme herméti-
queraont un double couvercle ; le couvercle supérieur est
visse. La marmite, au préalable remplie de lait et le cou¬
vercle mis en place, est placée dans un récipient plein d’eau.
L'appareil est mis sur le feu et on laisse bouillir le lait pen¬
dant une heure environ.
§ h. Stérilisatéurs Logay 7i° 1 et Rougeot. —Ce sont
des appareils analogues à la marmite américaine. Le pre¬
mier est formé d’un récipient métallique et d’un bouchon
en verre en forme de tube renversé, et portant une division
indiquant la température à laquelle le lait doit être maintcaiu
pendant une dizaine de minutes.
Dans le stérilisateur Rougeot, le récipient est en verre ;
un thermomètre adapté à rap]>areil porte l’indication de la
température que doit atteindre le lait.
§ c. Stérilisateur Ica'ct. — Ce stérilisateur est fort
simple et peut rendre de sérieux services. 11 offre l’avantage,
dans l’alimentation des nourrissons, de ne pas mettre à
chaque repas de l’enfant, le lait en contact avec l’air, comme
cela a lieu dans les précédents. Le récipient est en verre et
présente à .‘'■a base un petit robinet ; un bouchon en verre
ferme hermétiquement l’appareil et porte à son centre un
orifice conique qui, bouché avec un tampon de coton asep¬
tique, laisse agir la pression atmosph' riqbe. Le robinet
peut ainsi fonctionner. L’appareil porte sur une de ses faces
des granulations i)our le coupage du lait. 11 suffît de faire
bouillir le lait de ce stérilisateur pendant 40 minutes ou
bain-marie.
§ d. Stérilisateur Kschcrich. — Ce stérilisateur peu
l>ratique dans les familles et coûteux, présente cette parti-
— 97 —
cularité que le bain-marie est remplacé par un courant de
vapeur d’eau. Nous ne le citerons qae pour mémoire.
% e. Méthode de Soxhiet .— La méthode de Soxhlet
évite au lait stérilisé les pollutions dûes au transvasement ;
elle est basée sur la division du lait versé dans de petits
flacons, en nombre suffisant pour les divers repas des
enfants. Un récipient ou marmite à double fond, contenant
de l’eau, reçoit ces flacons ; l’eau ne doit pas dépasser la
moitié de la /lauteur de ces derniers qui ne touchent pas le
fond du récipient. On fait bouillir pendant trois quarts
d’heure, puis le couvercle de l’appareil enlevé, on retire les
flacons que l’on fait refroidir dans de l’eau à 12° ou 15° c.
Pour maintenir la stérilisation, Soxhlet avait d’abord
un système de bouchage consistant en un bouchon dë
caoutchouc perforé à son centre. Quand l’opération de
chauffage était jugée suffisante, on enfonçait dans le trou
central du bouchon un petit embout de verre. Soxhlet a
modifié plus tard ce système de fermeture en employant un
petit disque de caoutchouc placé sur l’ouverture, en forme
d’entonnoir des flacons et maintenu par une capsule en
métal, armée de 3 griffes.
Au moment du refroidissement, les gaz qu’ils con¬
tiennent se condensent etla pression atmosphérique enfonce
le bouchon de caoutchouc.
La rhéthode de Soxhlet, ayant pour principe la divi¬
sion du lait, préparé en petits flaconB, stérilisés ensuite au
bain-marie, en nombre suffisant pour les repas de l’en¬
fant, a donné naissance à de nouveaux appareils, offrant
chacun une modification souvent heureuse. Ainsi :
/'. — Le stérilisateur Legeay, n‘ 2, diffère du stérilisa-
Baudoin. 13
— 98 —
leur n° 2, en ce sens qu’il n’a pas de couvercle, les flacons
sont gradués afin de pouvoir pratiquer des coupages
variant avec l’âge du nourrisson. Le bouchage a lieu au
moyen d’un bouchon de caoutchouc, coiffant automatique¬
ment, à l’aide d’un ressort, le goulot de la bouteille.
g. — Le s téri Usa teur Gentilc. — Offre une fermeture des
flacons analogue à celle employée par Soxhlet. Le bouchon,
en caouchouc, à la forme d’un clou, qui placé dans le gou¬
lot du flacon, y reste suspendu, par la tète. La pression
atmosphérique, par suite du vide formé par le refroidisse¬
ment et la condensation des gaz qui s’échappaient durant
réchauffement, applique fortement le bouchon sur le gou¬
lot. Un petit cercle métallique, muni de deux crochets, et
par lesquels passe un lien, maintient en place l’appareil
obturateur.
h. — L'appareil Budin : dans lequel, les petits flacons
présentent un ingénieux et facile système d’obturation, que
l’on peut appliquer à toutes sortes de bouteilles. C’est une
sorte de petit capuchon en caoutchouc, qui coiffe le goulot
de la bouteille, en l’enserrant par sa partie inférieure et
rétrécie Une ouverture latérale du capuchon, correspon¬
dant à la partie supérieure de la bouteille, permet à l’air de
s’échapper, pendant le chauffage, et le refroidissement
final, produit la dépression centrale du capuchon, et par
suite l’obturation complète du flacon.
L’échauffement du lait au bain-marie, par un des pro¬
cédés précédents, n’arrive pas à détruire tous les micro¬
organismes, entr’autres ceux que l’on désigne sous le nom
générique de bar.iJlus subtilis, qui secrétent le ferment de
la présure, le labferment, et possède des spores résistant
— 99 —
à la chaleur humide de 100°, même prolongée pendant
plusieurs heures (Macé).
La stérilisation, quoique imparfaite, n'en est pas moins
suffisante, puisqu'elle fait disparaître non-seulement les
germes des principales maladies contagieuses, mais aussi
les micro-organismes, sécrétant le ferment lactique et qui
sont les agents principaux des troubles intestinaux.
En résumé, si nous voulons éviter tout danger de con¬
tagion par l'usage du lait cru, il nous faudra user de lait
stérilisé, préparé par une des méthodes industrielles si¬
gnalées; le lait stérilisé industriellement peut se conserver
assez longtemps et nous le conseillons volontiers pour
l'alimentation des adultes.
En ce qui concerne l'allaitement artificiel, il convient,
si l’on peut, de faire adopter par les familles un des pro¬
cédés dérivés de la méthode de Soxhlet ; si pourtant les
prix plus élevés du lait stérilisé du commerce, dans le
premier cas, ou bien, le coût de l'appareil, dans le second,
devenait un obstacle à leur emploi, que conviendrait-il de
faire ?
i)'L’ébullition. — La réponse est simple, à notre
avis, le médecin devra conseiller l'ébullition simple, et suf¬
fisamment prolongée, 10, 15 minutes et même plus, et le
lait sera ensuite absorbé, alors qu'il sera suffisamment
refroidi.
Ce conseil, bon pour l'adulte, et à la rigueur pour le
nourrisson, ne laisse pas moins à désirer que celui-ci, qui,
le moment du repas venu, ne peut attendre ; la| mère ou la
gouvernante, pourra alors préparer de petitqé bouteilles
contenant la quantité de lait nécessaire pour les divers
repas de l’enfant. Le goulot de chaque flacon sera au préa¬
lable bouché avec du coton aseptique. Ainsi, pendant le
chauffage, les gaz pourront s’échapper, et, lors du refroi¬
dissement, l’air entrant dans les bouteilles sera filtré, et l’on
ne craindra pas la réinfection du liquide.
On met les flacons, ainsi préparés, dans un récipient
aux trois quarts plein d’eau. On met au fond du bain-
marie un corps isolant, pour empêcher le contact des
flacons, dont un tiers au moins doit émerger hors du
liquide.
Pour qu’une bonne stérilisation du lait se produise,,
l’ébullition sera faite durant trois quarts d’heure.
— 101 —
CONCLUSIOÎVS
I. — Le lait est un excellent milieu de culture, et par
la présence des nombreux microbes que l’examen micros¬
copique y décèle, peut servir de véhicule à la contagion.
IL — La virulence du lait peut être directe ou indirecte,
c’est-à-dire provenir d’une infection générale de la femelle
laitière (tuberculose, fièvre aphteuse, etc.)ou locale (tuber¬
culose mammaire, mammite suppurée), ou bien être le
résultat d’un ensemencement accidentel du lait (fièvre
typhoïde, choléra, etc.).
III. — La contamination par le lait est surtout à redou¬
ter dans les grandes villes.
IV. — De toutes les maladies transmissibles par le lait,
la plus à craindre est la tuberculose à cause de la fréquence
de cette maladie chez les bovidés.
V. — Seule, la stérilisation nous met à l’abri de la
contamination par le lait.
VI. — Le reproche que l’on a fait au lait stérilisé de
cesser d’ètre un liquide vivant ne repose sur aucun fonde¬
ment : le lait stérilisé ou simplement bouilli présente au
point de vue digestif tous les avantages du lait cru, et
semble même lui être supérieur.
VIL -—Nombreuses sont les méthodes de stérilisation:
toute notre préférence est pour la méthode de Soxhlet ou
pour celles qui en dérivent.
VIII. — A défaut d’appareil stérilisateur on aura
recours à l’ébullition prolongée.
Vu : Le Doyen,
BROUARDEL.
Vu :
Le Président de la Thés*,
A. PROUST.
Vu et permis d’imprimer :
Le Vice-Recteur de l'Académie de Paris,
GRËARD.
— 103 —
INDEX BIBLIOGRAPHIQUE
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TABLE DES MATIÈRES
Pages.
INTRODUCTION... 7
PREMIÈRE PARTIE. — De la contagion par le lait cru. —
Considérations gén. 9
Chapitre I. — De la contagion en général par, le lait cru. —
Preuves de cette contagion. 12
A. Microbes pathogènes, et leur origine directe. 13
a. — Origine directe des microbes. 13
b. — id. indirectes id. 15
B. — Microbes saprogènes. 20
Chapitre II. — De la contagion en particulier par le lait cru. 24
A. — Contagion directe de quelques affections par le lait cru. 25
a. — Tuberculose,. 25
b. — Scarlatine... 35
c. — B’ièvre aphteuse. 42
d. — Pneumonie —.. 48
e. — Rage. 50
f. — Charbon. 51
g. — Typhus. 52
h. — Maladie iiinominée. 52
, _ Contagion indirecte de quelques affections par le lait cru 52
a. — Fièvre typhoïde. 52
Baudoin. 14
— 106 —
b. — Maladies do l’appareil digestif. 57
c. — Diphtérie. 68
d. — Choléra. ... 70
e. — Amygdalite..... 71
DEUXIEME PARTIE. — Du lait stérilisé dans l’alimenta¬
tion, au point de vue de la prophylaxie des maladies con¬
tagieuses transmissibles par le lait cru.—Considérations
générales. 73
Chapitre I. — Du lait stérilisé et de ses avantages dans
l’alimentation. 75
Chapitre II. — Stérilisation du lait. — Procédés divers.... 89
A. — Méthodes industrielles de stérilisation du lait. 92^
§ I. — Stérilisation incomplète. 92
a. Pasteurisation.. 92
b. — Méthode de Thiel^. 92
§ II. — Stérilisation complète. 94
Procédé de Hignette et Th. Timpe. 95
JB. — Méthodes usuelles de stérilisation du lait. 95
a. — Marmite américaine. 95
b. — Stérilisation Legay n° 1 et Rougeot.. 96
c. — Stérilisateur Icard. 96
d. — Stérilisateur Escherich. 96
e. — Méthode de Soxhlet.. 97
f. — Stérilisateur Legay n® 2.;.. 97
g. — Stérilisateur Gentile. 98
h. -i-Appareil de Budin... 98
i. — Ebullition.. 99
CONCLUSIONS.... 101
INDÉX BIBLIOGRAPHIQUE..... 103
PARIS. — Imprimerie Henri JÔÜVE, 15, Rue Racine.